Archives du vendredi
Chaque vendredi est publiée sur Facebook une archive sur l’histoire de la ville de Vierzon. Jean Foucrier, coup de feu rue des Changes, les fils d'Adrien Thouvenin, la ferme de Dournon... retrouvez ici toute l'histoire de notre ville.
Gros coup de communication pour la ville en ce début de mois de juillet… 1911.
Le 2 juillet 1911, débarquent à la gare messieurs Henri Brisson, président de la chambre des députés et Charles Couyba, ministre du commerce et de l'industrie, deux hôtes de marque pour la ville.
Les deux jours à venir vont drainer en ville une foule d'endimanchés qui vont assister à l'ensemble des festivités qui vont se dérouler aux quatre coins de la commune de Vierzon Ville.
Les Ecoles Nationales ont 25 ans
Hiver 1911. Au sein de l'Ecole Nationale Professionnelle, on se remémore que la première école nationale a ouvert ses portes aux élèves voilà 25 ans. Il s'agit de fêter dignement cet anniversaire. Et L'ENP de Vierzon sera l'Ecole qui organisera l'anniversaire au nom des quatre écoles professionnelles que sont Vierzon, Armantières, Nantes ou Voiron. La fête sera double, on en profitera pour mettre à l'honneur le millième membre de l'association des anciens élèves des écoles professionnelles.
Et pour Vierzon ce sera une date particulière. Le décret signant la création de l'école date de tout juste trente ans, le 9 juillet 1881.
Une délégation de l'Ecole part sonder le président de la chambre des députés qui accepte de venir à Vierzon à cette occasion. Rappelons que, ami personnel du maire Charles Hurvoy, il avait été un appui important pour que l'Ecole soit construite à Vierzon alors que Bourges était préférée à cause des établissements militaires.
L'Ecole fait une démarche auprès du maire Péraudin, autre ami de Brisson, et obtient une subvention de 6000 francs.
Pendant 7 jours, fin juin, la Dépêche du Berry va se faire l'écho des prochaines festivités, rappelant la genèse de l'Ecole, et distillant au compte-goutte le programme des deux jours.
Le programme
Le programme est grandiose. La société de pêche Le Barbillon propose un concours de pêche sur le canal où sont conviées pas moins de 160 autres sociétés. Toute la longueur du canal est ainsi occupée, de Villages à Forges.
De leur côté les sociétés de gymnastique La Vierzonnaise, l'Avant-Garde et les Energic's, associés pour l'occasion proposeront des démonstrations au cfamp de foire, accompagnés d'autres sociétés du Cher, comme Mehun , Bourges ou Saint Amand.
N'oublions pas la musique. Toutes les sociétés du Cher sont invitées. Toutes répondent présent. Au marché aux blés, place du Tunnel, place de la mairie, aux mails, les différentes sociétés se relaieront, sans oublier les musiques des pompiers et celle du polygone de Bourges. Et assureront les bals nocturnes sur ces mêmes places.
En ville, aura lieu le grand défilé, pêcheurs, gymnastes, pompiers, sociétés musicales qui parcourra le centre ville pavoisé pour rejoindre l'Ecole, lieu de la fête officielle, du banquet, et des nombreux discours qui seront reproduits in extenso dans la Dépêche du 4 juillet.
Fête de l'aviation
Et surtout, le clou du spectacle allait être la fête de l'aviation au Vieux Domaine. C''est la première fois que Vierzon allait recevoir ce type d'événement. Pour assurer un grand succès, toutes les entreprises de la ville vont fermer une heure plus tôt pour permettre aux ouvriers et employés d'aller sur place. Déjà la Dépêche distillait les infos : Ce sera grand ; ce sera du jamais vu ; les plus grands pilotes de l'air seront là...
Le 1er juillet, quand le journal publie le programme des fêtes de Vierzon, c'est un énorme monoplan qui remplit la page. Les as Level et Brindejonc sont annoncés. Level sur biplan Savary et Brindejonc, 18 ans, pilotant un monoplan Blériot. Les deux as devront se confronter dans une série d'épreuves. D'autres pilotes seront présents qui assureront explications et démonstrations sur plusieurs autres machines
Pendant ces deux jours les spectateurs sont autorisés à admirer les machines. Les plus téméraires auront droit à un baptême de l'air, ou plutôt « vol avec passager », comme on disait.
Et l'après-midi du 3 juillet a lieu le concours entre les deux as : concours de hauteur, concours de vitesse et concours d'atterrissage. A ce dernier concours, Brindejonc rate l'aire d'atterrissage et atterrit... dans le Cher. Plus de peur que de mal. L'homme et la machine sont indemnes.
La Dépêche du 4 juillet annonce plus de 10 000 visiteurs sur les deux jours d'exhibition aérienne. Tant et si bien que cela va donner l'idée au comité des fêtes de Vierzon de recommencer ce genre de spectacle. Il y en aura trois en tout. 1911, 1912 et 1913. Tous ont lieu au Vieux Domaine. Celui de 1913 sera le dernier. En effet, les aviateurs d'Avord avaient été sollicités. Un vieil avion biplan Voisin s'est écrasé en forêt de Vierzon après qu'une énorme explosion ait été entendue et que le pilote ut projeté à 350 mètres des restes de l'appareil « avec des blessures affreuses ». Le comité des fêtes ne renouvellera pas l'expérience pour 1914. De toute façon, les pilotes d'Avord se préparaient à une guerre...
La fée électricité
En 1911 la mairie n'a pas lésiné sur les décorations. Plusieurs arcs de triomphe ont été installés en ville, au sortir de la gare, rue de la République, place de la mairie, et avenue Henri Brisson aux abords de l'Ecole Nationale. Ils ont été agrémentés dizaines d'ampoules multicolores, éclairés dès le 1er juillet au soir. D'autres milliers d'ampoules électriques sont judicieusement placées sur les places et rues publiques où auront lieu les bals nocturnes. Le résultat donne un air de fête jusque là jamais égalé. Péraudin n'a pas regardé à la dépense pour promouvoir la fée électricité. Rappelons qu'alors, si les usines et administrations s'éclairaient électriquement, le plus grand nombre des particuliers s'éclairaient encore à la lampe à pétrole.
Les vierzonnais sont réveillés ce 2 juillet à 7 heures du matin par plusieurs salves d'artillerie tirées depuis le quai du bassin. A 10h00 les hôtes de marques arrivent à la gare. Un cortège se forme pour aller jusqu'à l'Ecole. Dans la salle des fêtes, des discours sont prononcés, on remet des prix aux meilleurs élèves et enfin on passe à table. Un banquet de quatre cents couvents, sonorisé par la lyre municipale et la musique des sapeurs pompiers de Vierzon. L'après midi est consacré à la visite des locaux et aux réalisations des élèves. Au passage on glisse dans l'oreille de Brisson que ce serait bien si l'école pouvait ouvrir une sections céramique malgré que Sèvres ne veut pas...En fin d'après-midi, c'est au tour de Péraudin de prendre la lumière. Il guide les officiels jusqu'au Bois d'Yèvre où vont être inaugurées les maisons HBM habitations à bon marché érigées par l'Abri Familial, ancêtre de France Loire.
Les officiels n'assisteront pas aux deux jours de festivités. Il repartiront le soir alors que la gare déverse toujours – selon la Dépêche – un flot incessant de curieux qui viennent participer aux festivités...
Dans son bilan du 4 juillet, le vocabulaire de la Dépêche est dithyrambique. Grandiose, exceptionnel, glorification, apothéose... sont là quelques uns des termes employés à de très nombreuses reprises au cours des deux pages souvenirs....
Images : Site internet BNF retronews - Archives municipales Vierzon
En ce matin du 4 juillet, Vierzon se réveille sonnée. Il y a encore une odeur de gaz lacrymo dans les rues lorsque les volets s'ouvrent.
Rapidement nombre de commerçants du centre ville, propriétaires ou gérants, vont devoir faire face aux vitrines éventrées. Et pour monter un dossier assurances, la première chose à faire est de porter plainte. Pendant que le commissaire rédige son rapport au préfet sur les événements de la nuit, c'est la cohue au dépôt de plaintes. Chacun son tour...
Mais Pulsar n'est pas officiellement terminé. Il restait cette dernière journée où Ray Charles devait se produire pour le concert de clôture.
Au milieu de la cohue, un homme fait attester de la présence de l'artiste à Vierzon. Il fait attester que l'impossibilité de se produire sur scène n'est pas de son fait mais de celui des organisateurs. Pour Ray Charles aussi, il faut un sésame pour que les assurances puissent régler son cachet...
Porter plainte... oui, mais contre qui ?
Certains voient que la Ravenelle n'est pas solvable. C'est contre la mairie que les dépôts de plainte vont avoir lieu. Mairie où le bureau du maire est assailli par une foule de mécontents. La mairie porte plainte contre la Ravenelle, la Ravenelle contre le détournement de fonds... C'est un imbroglio judiciaire qui commence en ce 4 juillet. Le dernier délibéré lié à Pulsar aura lieu en 1992. Il aura fallu douze ans et de volumineux dossiers pour éteindre l'incendie du 3 juillet 1980. Entre temps le bureau du maire avait changé de locataire.
La ville de Vierzon contre la Ravenelle
Au total, la mairie a fait une avance de plus de 1 million de francs à la Ravenelle, somme qu'elle sait ne jamais revoir. Elle se doit de porter plainte contre X pour protéger les intérêts de l'ensemble des vierzonnais.
La procédure va durer trois ans et aboutir à un non-lieu contre la Ravenelle (ordonnance du 17 octobre 1983). Il n'y avait de toutes façons pas d'autre solution : l'État avait demandé et obtenu la dissolution de l'association en juillet 1982.
En effet les livres de compte de la Ravenelle faisaient mention d'un déficit abyssal de plus de 1,6 million de francs. Un syndic est nommé et la procédure durera deux ans.
Mais il faudra encore deux ans pour que la Ravenelle sorte du tribunal. Le trésorier a en effet été poursuivi pour émission de deux chèques sans provision d'un montant total de 17 000 francs. Il sera condamné en 1984 à 1000 francs d'amende avec sursis, puis amnistié.
La ville contre le Trésorier payeur général
Après que les plus folles rumeurs aient été écrites dans la presse locale, après que chacun y ait apporté sa propre opinion, les services fiscaux se sont emparé de l'affaire. En substance il est reproché au maire d'avoir débloqué la somme de 620 000 francs (les deux dernières avances à la Ravenelle) sans prévenir personne et sans même en avoir le droit.
S'ensuit une correspondance glaciale entre les services municipaux et fiscaux. Cela se conclut par un épluchage en règle des comptes de la ville, tous services confondus. Il est même suggéré par les services de l'Etat que les sommes prêtés à la Ravenelle ont pu être détournés et atterrir dans d'autres poches. Ce qui était faux, bien sûr...
On en arrive au clash, le trésorier payeur général bloque tous les emprunts de la ville pour 1981. Pendant quelque temps la ville est en vraie situation de crise et ne peut plus honorer aucune dépense.
Mais une certaine élection présidentielle de mai 1981 va débloquer rapidement la situation... Affaire classée.
Les casseurs
Rumeur persistante en ville : Des hordes de casseurs auraient déferlé sur le centre ville pour le mettre à sac. On dit même que ce serait les organisateurs du Printemps de Bourges qui les auraient payé pour ça. Rumeur infondée. Du fait de casseurs, les dix interpellés par la police ont le même profil : des jeunes festivaliers chauds-bouillants qui ne peuvent pas voir leurs idoles favorites. Certains avouent avoir mis le feu au parquet place de la République. D'autres admettent avoir jeté « ce qui leur tombait sous la main » sur les forces de l'ordre. D'autres admettent leur participation « pour faire comme les autres ».
Déférés en comparution immédiate, les dix ont écopé de deux à dix mois de prison avec sursis. Six d'entre eux seront amnistiés par le nouveau pouvoir en mai 1981... Affaire classée
Les commerçants
Beaucoup de commerces ont vu leur vitrine cassée ; certains ont été pillés. Beaucoup avaient déposé plainte contre X mais, au vu de l'insolvabilité des dix interpellés comme de la Ravenelle, se sont retournés contre la mairie.
Dans les différentes audiences, les commerçants ont chargé la mairie comme co-organisatrice du festival. Ce n'était pas le cas. Les commerçants ont donc été déboutés de leur demande et n'avaient plus que leur assurance respective pour rembourser les dégâts.... Affaires classées...
L'intermédiaire de spectacles
La société Arlequin est donc le tourneur chargé de prendre les contacts avec les artistes. Mais pas que. Arlequin a aussi imposé la boîte du maintien de l'ordre. Elle a aussi fourni les chapiteaux pour les spectacles.
Or le 4 juillet, les chapiteaux sont en partis saccagés. Arlequin les rend dans cet état à son réel propriétaire, Monsieur Robba. Robba les avait loué à Arlequin qui les a sous-loués à la Ravenelle.
En octobre 1980, Arlequin assigne la ville pour les chapiteaux. Pourquoi ? Parce que la Ravenelle n'est pas solvable ? Non, mais parce qu'Arlequin n'est pas solvable. De fait, par contrat, Arlequin devait prendre une assurance pour les chapiteaux. Arlequin ne l'a pas fait. Arlequin s'est retourné contre la Ravenelle qui elle, avait pris une assurance. L'assurance de l'association n'a pas voulu payer. Donc Arlequin s'est retournée contre la ville. Mais Arlequin a été déboutée... Affaire classée.
La sécurité
La sécurité autour des spectacles était assurée par Securidog, siège social à Lyon. Les gros bras étaient dès le début considérés comme trop fébriles, par la Ravenelle, par le public, par la presse.
La boîte de sécu va envoyer trois factures à la Ravenelle dont une de 51 000 francs. La Ravenelle out, c'est à la mairie que cette dernière facture est présentée. Riposte de la ville : ce n'est pas avec nous que vous avez traité, c'est avec la Ravenelle. Sécuridog est déboutée en 1985.
Elle revient pourtant à la charge en 1992, avec « de nouveaux éléments ». En fait un employé affirme avoir traité verbalement avec la mairie. Témoignage insuffisant... Affaire classée.
1992 sera la queue de comète de Pulsar 80. Les « affaires » autour de Pulsar auront donc duré douze ans, concerné deux maires, à cheval sur trois mandats.
Il existe bien d'autres procédures liées à Pulsar... comme le parquet brûlé, la boîte de son et lumière, un festivalier blessé...
Une fois les affaires éteintes, la rumeur courait toujours qu'il existait un impôt « spécial Pulsar ». La aussi, chou blanc. Les sommes données au festival l'ont été en diminution d'autres projets municipaux...
Mais il existe des conséquences liées à pulsar. La première est l'installation d'une sous-préfecture à Vierzon, depuis 1985. Pulsar a montré le besoin de la proximité de l'Etat dans une grande ville comme Vierzon. Décision présidentielle suite à demande expresse du député de l'époque.
Autre conséquence pour la ville : la pérennisation de l'équipe du SMUR au sein de l'hôpital de Vierzon en 1984. L'essai pendant le festival avec une équipe détachée de Bourges avait montré toute sa nécessité...
On peut lire : Beurion et Leclerc, Il y a 20 ans la musique explosait à Vierzon Pulsar 80, CHPV, 2000
Images : Berry Républicain, Nouvelle République du Centre Ouest, Actuel, Best, L'escargot folk
Archives municipales Vierzon, Collections privées
« Pulsar 80, cet été la musique explose à Vierzon ». L'explosion a eu lieu. Pas forcément celle escomptée. Si aujourd'hui, plus de quarante ans après, on parle de Pulsar avec un brin de nostalgie mêlé de rumeurs tenaces, ce n'était pas le cas au lendemain du 3 juillet 1980, alors que les services municipaux se dépêchaient de nettoyer les stigmates d'une « nuit d'émeute » comme le titrait La Nouvelle République.
Pourtant le programme était alléchant ; tout aurait dû se dérouler à la perfection. Les organisateurs avaient tout prévu. Tout sauf le petit grain de sable qui grippe la machine et qui finit par la mettre en panne. Et ce petit grain de sable fut... un orage un soir d'été.
Organisation blindée et programme alléchant
La Ravenelle, c'est le nom de l'association organisatrice. Guère plus de 20 ans d'âge moyen. Depuis 1977 l'association organisait des festivals folks à Saint Georges sur la Prée qui attiraient entre 5 000 et 10 000 spectateurs selon les sources.
1979, la Ravenelle veut voir grand et proposer à Vierzon un festival multi-disciplines, du classique au rock,. Fort de leur expérience, la municipalité leur emboîte le pas et soutient le projet.
D'un point de vue logistique, la mairie va faire monter les chapiteaux et scènes, place de la République, au marché au blé, à Bellevue. Elle va préparer la signalétique et le barriérage, acheminer le courant électrique sur les différents lieu de programmation. Elle va encore prévoir de transformer ses stades en campings temporaires (Brouhot, Chaillot, La Bras, Canal) pour les festivaliers et les aménager avec l'eau courante pour des lavabos et des toilettes en nombres. Nombreuses sont les réunions techniques à avoir eu lieu au sein des services municipaux, à l'hiver et au printemps 1979-80.
Le maire demande qu'une équipe de secours d'urgence de Bourges (SMUR) reste à Vierzon le temps du festival. Il s'occupe également de l'augmentation nécessaire des effectifs de police et de gendarmerie. Le préfet fera alors appel à un renfort conséquent de CRS.
Et côté finances, la ville accorde une avance de 400 000 francs à la Ravenelle, remboursable à l'issue du festival. Quelques semaines plus tard, une deuxième avance du même montant sera octroyée à la Ravenelle.
C'est à peine suffisant pour signer les premiers contrats. La Ravenelle fait délibérément fuiter quelques noms pour faire monter la mayonnaise : Mama Béa, Jimmy Cliff, Bernard Lavilliers, Ray Charles. Ce sera grand, ce sera sur 8 jours, du 28 juin au 5 juillet.
100 000 personnes doivent passer par Vierzon, soit plus de 10 000 festivaliers par jour. Du jamais vu. Pulsar 80 dégoupille tous les à priori. Le jeune Printemps de Bourges n'a qu'à bien se tenir, Vierzon entre dans la danse.
Cela n'empêche pas les esprits chafouins. Le 28 juin la mairie doit se fendre d'un communiqué pour couper court aux rumeurs : « Les festivaliers seront le reflet de l'accueil que nous leur réserverons... »
Et la pluie s'en mêle...
En ce premier jour de festival, l'Orchestre de Mexico doit jouer sous le chapiteau de la place de la République. C'est sans compter sur ce petit grain de sable : la pluie. Tous les prétextes sont trouvés pour que l'orchestre ne joue pas : la scène n'a pas la longueur suffisante, le bruit de la pluie empêche de jouer normalement, les musiciens veulent prendre une douche et, ah oui, au fait, vous nous devez 62 000 francs. Bref l'orchestre se tire, et on apprendra plus tard que leur car faisait « Paris by night » à l'heure d'être sur la scène vierzonnaise.
Bon, il reste Angelo Branduardi pour faire décoller Pulsar. Mais l'orage redouble et le chanteur ne se produit pas non plus, malgré un cachet de 170 000 francs... Les spectateurs frustrés vont se rabattre au cinéma qui fait le plein avec un film de Mocky : « Piège à cons »...
« Né un soir d'orage ». C'est le gros titre de la presse ce 29 juin au matin.
La Ravenelle a la peur au ventre. Si la pluie continue, elle pense même à annuler purement et simplement le festival.
Mais Al Jarreau rapporte le soleil sur Vierzon et dans l'association. Le vrai démarrage du festival a lieu le ce 29 juin. Pourtant la Ravenelle n'est pas sereine : Billy Preston annule, John Lee Hooker également. De même que Trust qui sera remplacé par Higelin. Déjà il faut rembourser les billets...
Montage financier risqué
La Ravenelle, petite association locale, doit faire appel à un intermédiaire, un « tourneur », pour prendre les premiers engagements qui seront alors payés avec les avances octroyées par la ville.
La société choisie par l'association s'appelle Arlequin et appartient à Luc Gaurichon, qui impose également les deux boîtes, de sécurité (secury dog) et de son et lumière (light and sound).
La Ravenelle a accepté de prendre beaucoup de risque dans le montage financier du festival : Le principe est de payer les artistes du lendemain avec le montant des entrées de la veille.
La première journée est doublement catastrophique : Non seulement l'orchestre de Mexico et Branduardi ont touché leur cachet sans jouer, mais en plus il va falloir rembourser les spectateurs. Cela commence mal.
Les jours suivants ne sont guère mieux. Le maire « pour éviter le pire, une émeute de 6000 personnes », accepte de payer une nouvelle avance de 220 000 francs à la Ravenelle.
L'argent ne rentre toujours pas. La faute à qui ? Pourtant les concerts ont bien lieu, Mama Béa, Lavilliers, Valérie Lagrange...
Dans son livre blanc écrit au lendemain du festival, La Ravenelle est revenue sur certains points : Secury dog a embauché des Hell's Angels pour assurer la sécu. Ils font entrer leurs copains gratuitement aux concerts. Quand la Ravenelle compte 500 billets vendus, il y a 1000 personnes sous le chapiteau...
Quant à Sound and light, sonorisateurs anglais, Branduardi a témoigné de leur professionnalisme : « la couverture de scène des anglais n'était pas conforme »... Ils n'ont pas mis le matériel à l'abri de la pluie, c'est ce qui aurait fait reculer la chanteur par peur de l'électrocution.
Nuit d'émeute
Dès le troisième jour, en coulisse rien ne va plus. L'intermédiaire fait main basse sur la fin du festival et sur la billetterie. Ce sont entre 100 000 et 200 000 francs qui sont détournés, le trésorier, lui, est tabassé. Gaurichon aura ces mots : « Arrêtez de merder, le festival ne marche pas. Vous perdez de l'argent, on prend les choses en main ». La presse titre que les professionnels ont fait main basse sur Pulsar, Arlequin rimant avec requin.
Le flou règne sur le festival. Les festivaliers veulent comprendre : Pourquoi les annulations ? Pourquoi les artistes non payés ? Pourquoi les billets non remboursés ? La Ravenelle est en réunion avec la municipalité pour répondre à ces questions. Mais elle n'a plus la main.
En ce 3 juillet Les premières pierres volent. La camionnette de la billetterie est renversée. Higelin, qui vient d'arriver et qu'on a mis au courant du fiasco est prêt à jouer gratuitement pour apaiser les tensions. C'est sans compter sur les sonorisateurs anglais de sound and light qui remballent...
Le soir, les premières chaises sont brûlées place de la République, le parquet suit, la camionnette de la billetterie également.
La suite, il faut la chercher dans les rapports du commissariat de police. 2000 personnes autour du feu, il faut que la police protège les pompiers chargés d'éteindre l'incendie. Le grand chapiteau vient d'échapper au même sort mais est tout de même abîmé.
Les forces de police chargent à coup de gaz lacrymo. Les festivaliers s'éparpillent dans les rues annexes. Des vitrines tombent...
Higelin quant à lui entraînait quelques uns des festivaliers jusque dans un bar de Marcilly en Gault pour un concert improvisé.
Ce 4 juillet, le Berry Républicain titre sur « une folle nuit ». Les émeutes ont duré jusque 2h30 du matin. 10 jeunes ont été interpellés par la police et 3 policiers ont été blessés.
Au matin, lorsque les services municipaux nettoient les stigmates de cette folle nuit, les premières plaintes arrivent sur le bureau du commissaire. Pulsar entre dans sa deuxième phase, judiciaire, celle-ci...
Images : Archives municipales Vierzon
Les plus anciennes traces de notre passé médiéval sont en centre ville, dans le « vieux Vierzon » avec l'église Notre Dame d'un côté, et le beffroi de l'autre. Les parties les plus anciennes de l'église sont du 11e siècle, le beffroi date lui du 12e siècle.
Pourtant, de patrimoine religieux, il en existe une autre trace, qu'il faut chercher un peu plus loin, dans ce qui n'était pas la ville à l'époque. Patrimoine aujourd'hui privé, dissimulé derrière une haie, mais que de nombreuses générations de collégiens et lycéens ont dû découvrir en se demandant – ou pas – quel pouvait bien être ce bâtiment. En effet, il se situe rue Charles Hurvoy, juste en face de l'entrée principal du lycée. Aujourd'hui il ne reste plus qu'un seul bâtiment, la chapelle, d'un ensemble qui se trouvait être une maladrerie.
Au retour des Croisades, les seigneurs français n'ont pas rapporté que des trésors pris en Terre Sainte, ils ont également rapporté une cruelle maladie incurable, la lèpre.
Dans beaucoup de localités, le 12e siècle a ainsi vu s'ériger des maladreries ou léproseries, hors les murs des villes, très à l'écart des citadins et de la contagion.
Vierzon ne déroge pas à la règle qui voit se construire une maladrerie pour femmes quelque part au 12e siècle, loin du centre urbain, « sur le grand chemin de Paris » nous disent les archives. Ce grand chemin de Paris, en sortant de la rue Porte des bœufs, passe par les rues Perrin, Hurvoy, Fourrier et Flourens.
De son passé de maladrerie, il perdure aujourd'hui le nom de tout le quartier de la cité scolaire : « les Malvoisines ». Malvoisines, comme ces femmes qu'il faut éviter de côtoyer de trop près.
Quant à la rue Hurvoy, elle s'est pendant de nombreux siècles appelée la « rue Saint Lazare ». Et même « rue Saint Ladre » au 16e siècle.
Il existait une deuxième maladrerie à Vierzon, une maladrerie pour hommes. Malheureusement, de celle-là les archives n'en ont pas gardé souvenir. Il est fort probable qu'elle ait été située au Bois d'Yèvre, aujourd'hui Vieux Domaine, là encore à l'écart de la ville (il existe toujours une rue Saint Lazare au Vieux Domaine). Hommes et femmes non mélangés, la morale chrétienne restait sauve.
Des deux premiers siècles de son existence on ne sait rien du fonctionnement de la léproserie pour femmes. C'est autour de la fin du 14e siècle que l'on peut commencer à l'appréhender. La maladrerie est alors rattachée à l'Hôtel-Dieu qui vient d'être construit, lui aussi hors les murs de ville (aujourd'hui l'école Emile Charot). Elle possède ses propres revenus qui doivent permettre de s'occuper des « pauvres malades de la paroisse exclusivement ». Ces revenus sont sous forme d'une rente due par le seigneur de Vierzon mais également par l'exploitation de vignes et de bois qui entouraient Saint Lazare. Ces revenus sont très supérieurs à ce que coûte réellement le service des lépreux et feront l'objet de convoitise de la part des édiles municipaux, au 17e siècle.
Pour l'heure, la maladrerie de Saint Lazare regroupe trois bâtiments : une maison pour les lépreuses, une maison pour le soignant (cette dernière va être agrandie lorsque les sœurs hospitalières s'en occuperont), et bien sûr la chapelle qui, 800 ans plus tard, a conservé sa magnifique charpente sculptée. Aujourd'hui il ne reste plus que la chapelle mais les restes des anciennes maisons étaient encore visibles il y a une soixantaine d'années. Accolé à la chapelle il y avait le cimetière, sans cesse réutilisé. C'est ainsi que des travaux aujourd'hui pourraient faire émerger plusieurs strates de squelettes.
Au sortir de la Guerre de Cent Ans, Vierzon se dote d'un Collège. Nous sommes en 1460 et le premier « modérateur des escholes de Vierzon » est Jean Béguin, futur recteur de l'Université de Bourges. Le revenu initial du collège ne suffisant pas à son activité, les élus de la ville vont plaider auprès du conseil privé du roi, le droit de rattacher les revenus de la maladrerie à ceux du collège. Ce sera chose faite par arrêté le 26 mars 1663. Les élus vierzonnais viennent enfin d'obtenir le droit de gérer eux-mêmes les revenus de la maladrerie. Bientôt le collège ne sera plus seul bénéficiaire des revenus de Saint Lazare. Dès 1693, ce ne sont que 100 livres qui lui sont affectés alors que le revenu en rapporte près de 600.
Tout au long du 18e siècle, les réparations « urgentes » se multiplient alors que la lèpre disparaît.
A la Révolution Française le bâtiment est vide, aucun curé ne vient plus dire la messe. Dès lors, pour la commune, pourquoi conserver les bâtiments ?
Il sont rapidement vendus. Par contre, les bois autour sont précieusement conservés ; leur exploitation rapporte de l'argent au budget.
Aujourd'hui, il ne reste plus qu'un nom, « Malvoisines », et une chapelle pour remémorer la fonction du lieu...
Images : Archives municipales, clichés F. Fontaine
Si l'on en croit le cartulaire des moines de l'abbaye saint Pierre de Vierzon, le terrain devenu basse-cour du château leur appartenait de tous temps (quartier tunnel-château aujourd'hui). Ce n'est que l'abbé Syon, abbé du début du 11e siècle qui l'aurait donné à un seigneur pour que ce dernier en fasse sa forteresse. Ceci permet en outre d'avoir une explication logique du toponyme de « Sion » pour la butte du même nom.
Mais du cartulaire de Vierzon, quelques chartes sont fausses... dont celle de cette donation de Syon.
En fait, quittant Saint-Georges-sur-la-Prée en 903 sous la pression des Normands, les moines s'enfuient dans un monastère qui leur appartient, sur les bords de l'Yèvre, « dans le château de Vierzon », donc sous la protection du seigneur local qui est lui-même vassal du Comte de Blois Chartres et Chambord.
Toujours prompts à voir leur prééminence affirmée, les moines de Saint Pierre en avaient oublié quelque peu l'épisode douloureux des invasions Normandes.
Le château de Vierzon en 903 est loin d'avoir l'aspect d'un château médiéval type. Il faut imaginer une tour en bois sur la butte de Sion, tour peut-être entourée d'une palissade. Mais rien n'est moins sûr, la « Pax Romana » ayant détruit toutes les murailles des villes. Ce seront les Capétiens puis le 12e siècle de Philippe Auguste qui remettront les murailles défensives à l'ordre du jour.
La « chronique de Vierzon », texte introuvable aujourd'hui mais que Toulgoët avait entre les mains en 1880, veut que Vierzon ait été incendiée en 1067. C'est dans le siècle qui suit qu'il faut imaginer la construction du château tel que les rares vestiges peuvent encore nous laisser supposer son apparence.
Ainsi est né le premier rempart vierzonnais aux 22 tours et portes. Ainsi est née la tour d'entrée du château, plus tard appelée tour du guet, beffroi, porte des bans ou bien même prison, selon les époques et son utilisation. Ainsi est née la tour dite de l'arsenal dont les créneaux sont du plus pure style 19e siècle, à la Viollet-le-Duc. Ainsi est né le château proprement dit dont la seule pièce d'origine restée intacte – la cave – peut encore nous laisser imaginer sa superficie. Ainsi sont nées la cour et la basse-cour du château.
Si l'on en croit Guillaume le Breton, chroniqueur de Philippe Auguste, dans « tout le pays de Berry que le soleil dore de ses rayons, on ne pouvait trouver un château plus magnifique ni entouré de terres plus fertiles. A droite s'étendent les plaines de la Sologne fécondes en grains, à gauche les replis du Cher qui coule doucement au milieu de prairies verdoyantes, sillonné de barques et abondant en poissons... ».
Il faut bien le reconnaître, il a dû y avoir un raté entre le 12e et le 19e siècle. Si l'on croit Félix Pyat, la Sologne est devenue insalubre, l'air y est un miasme, l'homme n'a d'humain que d'aspect et son esprit s'est arrêté avant la fin de son développement. Plutôt que d'envoyer les bagnards à Cayenne, Pyat proposait « des condamnations à la Sologne ». Là au moins les forçats auraient fait oeuvre utile à défricher et assainir les marécages boisés. Sologne n'était pas encore synonyme de bon vivre ou parties de chasse.
De la même manière, le « magnifique château » de Guillaume le Breton a perdu de sa superbe entre les 12e et 19e siècle.
D'abord en 1356. Le Prince Noir détruit le château de Vierzon et en tue tous les hommes (Froissard). Mais Vierzon la traître au roi de France sera punie par Charles VI : Interdiction lui est faite de reconstruire un quelconque système défensif. Le château ne sera jamais reconstruit, seule subsiste la cave, utile au gouverneur-représentant du roi pour y loger les vins du domaine et taxes en nature.
Cet épisode de la Guerre de Cent Ans sera funeste pour Vierzon. Il explique notamment le manque de vestiges médiévaux dans notre cité.
C'est ainsi que la basse-cour ne sera bientôt plus protégée, que les pierres des murailles serviront à construire des étages supplémentaires aux maisons existantes ou à en construire de nouvelles.
De bourgeois, le quartier « Château » va peu-à-peu se paupériser à partir du milieu du 18e siècle et la création des routes royales. Les artisans et commerçants préfèrent voir leurs échoppes se développer autour de ces voies nouvelles de communications que sont la rue Armand Brunet et la rue de la République, les grand et petit mails prenant du galon par la même occasion.
Le constat de Pyat est sévère. Il en est d'autant plus douloureux que son auteur est originaire de la ville, qu'il est né à quelques pas du quartier traité de cour des miracles.
Et ce n'est pas l'arrivée du chemin de fer en 1847 qui aura changé sa physionomie. Tout juste son nom. On est passé du quartier « château » au quartier « tunnel château ». Les terres extraites du tunnel vierzonnais ont vite recouvert une partie des vignes du Clos du Roy. Un beau parking y est tracé aujourd'hui : celui des acacias.
Un siècle plus tard les choses ne se sont pas arrangées.
Nous sommes dans les années 1950 et le projet, impulsé par la municipalité de Maurice Caron, est de détruire tout entier le quartier pour reconstruire du neuf. A voir certaines photos on se dit que Caron puis Mérigot n'avaient pas tort dans leur volonté de modernisation.
N'oublions pas que les années 1950 sont celles du mal logement. Rappelons nous « Hiver 54 », l'appel de l'abbé Pierre. Retentissement d'autant plus grand que Vierzon eut à subir les bombardements de juillet 1944. Au total plus de 25% des habitations de la ville auront été détruites par les bombes et, à l'aube de 1960, la municipalité Mérigot estime à 300 le nombre de familles vierzonnaises mal logées. Il existe encore des baraques « provisoires » sur la place du Tacot ou aux Forges. Sans oublier les taudis du centre ville.
Construire des HLM dans le quartier permet de faire coup double : détruire un îlot insalubre certes, mais aussi de construire un quartier à l'image de ce que voulaient les élus. C'est ainsi que les plans font apparaître, juste derrière le beffroi, un centre de congrès – musée, une maison des jeunes et enfin une bibliothèque.
Ces investissements culturels passeront rapidement au second plan tant la politique du logement est importante. Les financements qui arrivent au compte-goutte seront ainsi redéployés dans d'autres projets immobiliers : Colombier et Sellier.
En 1960, l'heure n'est pas encore à la protection du patrimoine. C'est là une idée qui viendra avec les années Giscard, amplifiée par la politique de Mitterrand. Pour l'heure, il s'agit de mettre à disposition des vierzonnais les commodités auxquelles ils aspirent : l'eau courante est au robinet, eau froide eau chaude ; pas besoin d'aller « au fond du jardin » pour trouver les lieux d'aisance. Quel confort pour nos contemporains à qui on a remis les premiers les clés de leur appartement, en 1964 !
La seule chose que l'on puisse regretter aujourd'hui est bien l'absence totale de fouilles archéologiques ante reconstruction. Quelques rares éléments éparses ont été retrouvés, mais l'absence de relevés et d'analyse scientifique hypothèquent pour longtemps notre histoire locale, surtout sur les siècles qui nous manquent, le temps des mérovingiens, le temps d'avant le cartulaire des moines...
On peut lire : Félix Pyat, le château de Vierzon, 1848
Images : Archives municipales Vierzon
À Vierzon, il est une tradition vieille (presque) comme le lycée Henri Brisson : les funérailles de Père Cent. Fin mars début avril, les élèves de dernière année fêtent leurs derniers cent jours au lycée, derniers cent jours avant de rentrer dans la vie active ; derniers cent jours avant de devenir des anciens, des « Vierz'arts ».
Le Père Cent a été copié sur la tradition militaire de la Quille et symbolise les cent jours restant avant la fin de quatre années d’études à l'École Nationale Professionnelle, créée en 1883.
Organisé clandestinement quelque part au sortir de 1918, les directeurs de l’époque ont réprimé ce joyeux chahut au nom de la sacro-sainte discipline. Selon la tradition orale, les premières promos se retrouvaient plus ou moins clandestinement en forêt pour y brûler un petit cercueil confectionné en cours d'année. Et cette même tradition orale parle d'aventures plus alcoolisées, au Chalet de la forêt ou dans quelques bars en ville. Il faudra attendre les années 1945 – 1946 pour que cette tradition soit officiellement autorisée, qu'elle prenne son rythme de croisière,0et devienne un éclat de rire sur la ville.
Organisé le week-end des Rameaux, tout commençait avec la préparation des locaux. Jean-Pierre Desbordes, ancien élève et président des Vierz’arts se souvient : « Il y avait vraiment beaucoup de monde qui venait à notre bal, les autres écoles étant invitées. C’est pourquoi nous sonorisions les salles de classe à côté de la salle des fêtes. Comme ça tout le monde pouvait profiter de la musique. Et quelle musique ! Des pointures se sont produites à l'ENP, Stéphane Grapelli, Claude Bolling... mais aussi l'orchestre de Claude Chevalier, par exemple. Cela permettait également aux élèves de souffler un peu entre deux danses. D’autant plus que les bars se trouvaient dans ces salles annexes, tous tenus par les professeurs qui empêchaient certains débordements et tenaient lieu de chaperons. » Et les salles n’y suffisaient pas. Des parquets étaient loués pour l’occasion, montés dans la cour d’honneur du lycée.
« Une semaine avant les festivités nous organisions une chapelle ardente au sein du lycée, dans une salle de classe. La porte était entourée d’un grand dais noir et les élèves de toutes les classes devaient veiller à tour de rôle le cercueil que nous avions confectionné, et rempli de pétards et souvenirs hétéroclites. »
Un faire-part de décès comme invitation
Il fallait annoncer la manifestation. Chaque promotion réalisait son faire-part. A l’intérieur, un trombinoscope de tous les élèves en partance du lycée. Sur celui de Jean-Pierre Desbordes, on peut lire que monsieur O. Piffe fabricant de fraiseuses, que Riri Ogras pharmacien non diplômé, et les élèves G. Hunebul et S. Pèrancore annoncent l’enterrement de Jean né AnkoreCent.
Les festivités commençaient par des sketchs que les potaches jouaient devant un public hilare. Des sketchs « faits maison » où l’on s’amusait à parodier les professeurs, leur façon de s’habiller, leur gestuelle et leurs tics de langage. Les intéressés n’ont jamais montré la moindre animosité envers les jeunes créateurs... Sauf en 1951, où le directeur, brocardé, a interdit ce type de manifestation pour les années suivantes.
Le clou du spectacle : le défilé en ville dont la légende veut qu’il ait été mis sur pied uniquement pour faire de la propagande pour le bal du soir. Tout le monde se prépare dans l’enceinte du lycée. Six élèves portent le cercueil, en grand costume, casquette à la main. Sur le cercueil, un drap blanc avec le veston et la casquette du défunt. Dans le cortège le curé d’un jour et les élèves portant les outils de leur spécialité. Les fondeurs défilaient avec leur bleu, les céramistes en blouse blanche, les modeleurs avec leur hélice sur l’épaule. La fin du défilé était dévolue aux costumes les plus loufoques possibles, des étudiants langés dans des poussettes, tétine à la bouche, par exemple.
Des bouchons jusqu’à Salbris
Tout ce cortège partait en ville via la rue de la République et le Mail pour remonter jusqu’au lycée. Et c’était là une course de lenteur : « Le record à battre était de deux heures pour faire le trajet du lycée à la place Foch ». Et le long du trajet une foule immense qui attendait les potaches pour tenter de faire rire les porteurs avec des grimaces. Mais leur fonction leur interdisait le moindre rictus. « J’ai vu des gens qui n’étant pas de Vierzon se sont signés au passage du cortège. On pouvait lire l’incompréhension sur leur visage à la vue des derniers costumés à défiler. »
Deux heures pour descendre, le plus lentement possible, au son de la Marche Funèbre de Chopin, jouée par les élèves musiciens. En ce temps où la déviation n’existait pas et où l’on ne parlait même pas encore d’autoroute, on imagine les bouchons qui se formaient de part et d’autre de Vierzon. « C’est simple, l’embouteillage commençait dès Salbris. Et c’était pour nous une source de fierté d’avoir à ce point désorganisé la circulation. En remontant, nous chantions notre chanson : la DKL comme « décaler » de Vierzon. Les premières paroles étaient les suivantes : Vierzon nous te quittons, sans regret sans amertume ». Quant au cercueil, il devenait feu de joie pendant le bal, à minuit pile, dans la cour d'honneur du lycée...
Plusieurs fois, la tradition du Père Cent a failli disparaître, plusieurs fois elle a ressuscité. Interdite en 1969 par la police pour cause de perturbation de la circulation automobile, la mise en place de la déviation a permis son retour des années plus tard. Le changement de lieu du bal (salle Sologne) ou encore la non participation de tous au défilé et l'abandon du costume de l'école ont fait que les anciens ne s'y retrouvaient plus et ne venaient plus.
Aujourd'hui accolée à Carnaval, espérons que la mayonnaise reprenne...
On peut lire : L' Ecole Nationale Professionnelle de Vierzon, Jean-Pierre Desbordes et Claude Richoux, La Bouinotte, 2011
Images : Archives municipales Vierzon
Lorsque l'affaire éclate, en 1730, il y a bien longtemps qu'il n'y a plus de seigneur de Vierzon ; la Guerre de Cent Ans avait balayé les derniers successeurs de Humbaud.
La seigneurie fut reprise par le roi de France en personne et distribuée (revendue...) à qui bon lui semble.
C'est ainsi que la terre de Vierzon (qui va jusque La Ferté-Imbault) passe entre les mains du duc Jean de Berry, ou encore entre celles de Louis de Laval. La baronnie de Vierzon entrera ensuite en apanage aux enfants puînés du roi. Le dernier d'entre eux étant le Comte d'Artois,, futur Charles X et bâtisseur du premier établissement industriel de Vierzon, en 1779.
Juste avant le Comte d'Artois, l'apanagiste du domaine vierzonnais en était Louise Elisabeth de Bourbon Condé. Fille de Mademoiselle, née en 1693, elle est la petite fille de Louis XIV.
Après son mariage en 1713, elle devient princesse de Conti et c'est sous cette titulature que les vierzonnais la connaîtront, et contre laquelle les moines devront plaider...
Franchise saint Pierre
Depuis l'origine, l'ensemble des vierzonnais se doivent de payer leurs impôts et taxes au seigneur de Vierzon (banalité, taille, cens, champart…)
Hervé 1er, de retour – vivant – de la croisade, offre des libéralités à de nombreuses institutions religieuses, dont l'abbaye saint Pierre de Vierzon.
En 1182, une charte signée de sa main offre aux moines les droits qu'il possède dans une partie de la ville. Cette portion de ville devient la « franchise saint Pierre » sur laquelle les moines jouissent des droits seigneuriaux comme le cens et les dîmes.
Cette charte est particulièrement intéressante puisqu'elle décrit Vierzon à la fin du XIIe siècle. Son texte, très résumé, est le suivant :
« la terre ou franchise de saint Pierre est circonscrite par quelques rues publiques et commence à une tour et un carrefour qui sépare la terre de saint Pierre de la rue des forges… jusqu'à une grosse pierre appelée gros caillou… De là elle va jusqu'à… la maison de la Monnaie, puis… jusqu'à l 'église Notre Dame… puis au bas de la motte de l'église jusqu'aux clôtures de la basse ville et sur le bord en face des moulins du monastère de l'Yèvre, puis [suit le cours de l'Yèvre] jusqu'au mur de ville et de là en remontant jusqu'au carrefour de la rue des forges. »
La charte est reproduite dans les registres du bailliage de Vierzon, l'original étant dans le fonds de l'abbaye des archives départementales. L'original date bien de 1182 mais il manque le protocole final (nom du signataire, des témoins, la date et surtout le sceau du seigneur et celui des moines).
Un long procès de 15 ans
En 1730, le procès qui s'ouvre au bailliage de Vierzon concerne les deux principaux propriétaires fonciers de la ville, deux seigneurs ayant les mêmes droits, un ecclésiastique et un noble. Il peut ainsi se résumer : la princesse essaye d'affaiblir le père abbé pour récupérer une partie des revenus et augmenter ainsi sa rente.
Cela passe par une contestation du périmètre de la franchise saint Pierre où s'appliquent les droits et la justice de l'abbé.
En 1729, Nicolas Gourdon, procureur de la princesse, fait établir en son nom un droit de festage sur une liste de maisons incluses dans la franchise des moines. Il accorde des dispenses de cet impôt à d'autres maisons du même périmètre.
Les moines, abbé en tête, prennent évidemment ombrage de la situation et vont plaider leur cause auprès de la princesse. Mais celle-ci est bien décidée à faire dresser un terrier du domaine royal qu'elle exploite, en y incluant une partie de la franchise des moines, notamment leur four et leur moulins banaux ainsi que la rivière d'Yèvre sur laquelle les moines avaient des droits.
Une commission devant le bailliage de Vierzon est alors mandée.
L'arpenteur Legendre dresse un plan selon les dires des deux parties (voir plan ci-dessous).
Les moines ont alors exhibé leur charte de 1182 mais sa véracité est contestée par les avocats de la princesse. L'argument est le suivant : Il ne peut s'agir que d'un faux puisqu'il en manque une partie : le protocole final (date, noms des témoins, signatures, sceaux).
De fait, cette partie a sans doute été abîmée et est effectivement manquante, ce qui désarçonne la plaidoirie des moines.
Il faut dire que l'avocat vierzonnais de la princesse n'est pas un inconnu. Il s'agit de Béchereau, avocat du roi, qui publie ses « mémoires sur Vierzon » en 1748, livre considéré comme le premier livre d'histoire sur Vierzon.
Les dix premières années du procès sont synonymes d'enquêtes, de contre enquêtes, de procédures et de recours variés qui allongent sa durée.
En 1742 une première transaction a lieu. Elle est au bénéfice de la princesse. Les moines doivent céder leur titre de possession sur la rivière d'Yèvre ainsi que leur droit de péage sur le pont d'Yèvre, selon la formule « condamnons les bénédictins à se défaire des rivières d'Yèvre et petit moulin au profit du roi ».
L'affaire n'en est pas restée là, les moines ont fait appel à la justice royale et la suite de la procédure se trouve aux archives nationales.
Malheureusement, la pièce maîtresse du procès y est manquante : le jugement final. En effet, ce procès n'est jamais allé jusqu'à son terme, les deux parties ont préféré transiger. La transaction se fait en présence des deux parties, le premier juillet 1745. Et il faut en rechercher le texte dans les archives de la maison de Conti.
Transaction négociée
« … entre très haute, très puissante et très excellente princesse Madame Louise Elisabeth de Bourbon, veuve de très haut, très puissant et très excellent prince monseigneur Louis Armand de Bourbon prince de Conti, demeurant à Paris en son hôtel, rue Saint Dominique, étant ce jour au château de Monseigneur le duc d'Orléans au château de Saint-Cloud d'une part, et Monsieur Jacques Nicolas Bernot de Charant, abbé commendataire de l'abbaye royale de Vierzon, chanoine de l'église de Bourges, y demeurant ordinairement, étant présentement à Paris logé à l'hôtel d'Auvergne quai des Augustins d'autre part : lesquels ont dit qu'il y a instance pendante et indécise depuis longtemps au bureau des finances de Berry, au sujet du droit de festage dû au roi en la ville et bailliage de Vierzon, et à Son Altesse Madame la princesse de Conti comme engagiste du domaine de Vierzon... »
La déclaration est très longue et se conclut par une volonté de transiger du fait que les droits réclamés par les deux parties « n'étaient pas assez considérables pour être mis en balance avec les frais d'opération qu'il conviendrait de faire pour éviter une plus ample contestation et terminer et assouplir ladite instance, ont transigé... »
De fait, la princesse et les moines trouvent un accord pour faire taire la querelle et éviter la poursuite d'un coûteux procès dont les frais sont plus élevés que les sommes en balance.
C'est là une vérité beaucoup plus grande pour les moines que pour la princesse qui a des moyens quasi illimités et qui pourrait poursuivre la procédure...
De là à dire que le père abbé Jacques de Charant a eu le bras tordu pour signer la transaction...
Elle se termine tout de même à l'avantage de la princesse. Pour arrêter la procédure, les moines devront s'acquitter d'une grosse somme d'argent en nature : « c'est asavoir au moyen de cent boisseaux de froment mesure de Vierzon, chacun pesant quinze livres »... payable chaque année par les moines à la Noël au château de Vierzon.
En échange de quoi le périmètre de la franchise saint Pierre n'est plus contesté par la princesse.
De cette transaction il résulte que la princesse a obtenu gain de cause, augmentant la rente vierzonnaise de ses possessions. Véritable femme d'affaire, c'est une fois devenue veuve de Conti qu'elle entreprend de reprendre tous les comptes du couple dont le mari ne s'occupait guère. C'est ainsi qu'elle lance ses avocats dans toutes ses possessions, multipliant les procès... qui aboutissent invariablement à une transaction à son avantage. Ainsi, toujours dans la baronnie de Vierzon elle va encore harceler le prieuré de Mennetou, lui aussi fondé par les seigneurs de Vierzon, et qui se voit contraint à son tour au même type de négociation pour échapper au procureur de la princesse...
Sources : Archives du Cher, H227
Images : Portrait de la princesse de Conti, par Gobert, BNF, Archives du Cher, Archives municipales Vierzon
29 décembre 1895. 33 premiers spectateurs assistent à la première projection mondiale d'images qui bougent. La sortie des ouvriers de l'usine Lumière et l'arroseur arrosé en seront deux films vedettes. Méliès achète aux frères Lumière un cinématographe, des kilomètres de pellicule et devient le premier auteur-scénariste-metteur en scène-gagman-inventeur d'effets spéciaux de l'histoire du cinéma.
Baraque foraine
L'engouement est rapide. Les saynètes comiques y sont pour beaucoup. Vierzon ne déroge pas. Le cinématographe est tombé sur la ville au tournant du XXe siècle. Sous la forme d'une baraque foraine installée sur le terrain vague de la Croix Blanche qui deviendra en 1905 place de la République (aujourd'hui square Péraudin).
Pathé et Gaumont sont des concurrents sérieux qui proposent chacun un nombre considérable de productions à l'année. Les cafés de la ville ont flairé le filon et seront les premiers à organiser des projections de façon pérenne. Les années 1910 ont alors vu la multiplication des séances de cinéma dans tous les quartiers de Vierzon. Dans une liste non exhaustive, on peut tout de même citer quelques lieux récurrents : le café Laroche à Vierzon Villages, Le Poisson frit rue Etienne Marcel, ou encore celui de la Noue en haut de l'avenue du 14 juillet.
Mais, de mémoire d'ancien vierzonnais, la salle emblématique de Vierzon fut celle des « Arts », à la Croix Blanche, tenue par les époux Toyot : Café, salle de concert, dancing et dorénavant séances de cinéma le dimanche après-midi. Les époux Toyot aménagent même une salle dédiée au cinéma à quelques dizaines de mètres des « Arts », rue Gourdon, dans un ancien hangar de l'usine Merlin (aujourd'hui parking en face le garage anciennement Renault). Ainsi naît le « Casino ». Nous sommes alors en 1909.
Le Carillon
Au 20 de la rue Gourdon, à deux pas du Casino, était un atelier de charronnage, appartenant aux frères Charles et Louis Lavezard. En 1926, il n'y a plus de débouchés pour les voitures à cheval. Les automobiles et camions sont les rois des routes.
Ils changent totalement de métier et décident d'ouvrir une salle de cinéma. Elle s'appellera le Carillon, avec une cloche comme enseigne. Il ne s'agissait pas de faire concurrence au Casino voisin, puisque leur décision a été prise alors que des bruits courraient que ce dernier allait fermer définitivement ses portes. Le Casino poursuivant, ce sont deux salles qui se sont côtoyées durant une trentaine d'années.
Un journaliste de l'époque écrivait en ces termes sur le nouveau cinéma ouvert le 30 octobre 1926 : « Bien installé avec ses boiseries de teinte claire, ses rampes d'ampoules électriques soulignant les grandes lignes du pourtour et du plafond, elle est la salle chic de Vierzon ».
Et qui de mieux qu'un ministre pour inaugurer cette salle ?
En fait, 1926 fut également l'année de l'électrification de la ligne de chemin de fer Paris – Vierzon.
Celle-ci fut inaugurée en grande pompe le 22 décembre 1926, à Vierzon, autour d'un banquet présidé par le ministre des Travaux publics André Tardieu, en compagnie d'un aréopage d'ingénieurs... et de tout le Gotha mondain, le maire Péraudin en tête. Et le banquet eut lieu au Carillon, transformé pour l'occasion en salle de restaurant (voir images ci-dessous).
Toujours dans le spectaculaire, le Carillon fidélisait ses spectateurs avec des événements d'ampleur. Le premier film projeté avait été un film muet de chez Pathé « Simone ». En avril 1927 c'est la Gaumont qui entre en scène. À l'occasion de la sortie du « Ben Hur » de Fred Niblo (qui durait la bagatelle de 3 heures), c'est le train routier de la Gaumont qui parade rue Gourdon offrant des objets publicitaires et des places gratuites au cinéma. Un journaliste relate même qu'un curé de campagne est venu « à bicyclette avec ses ouailles pour assister à une représentation qui montrait la vie édifiante des premiers chrétiens en butte aux persécutions païennes ».
Côté innovation technique, c'est également au Carillon que cela se passe. Il sera le premier cinéma équipé d'une double machinerie qui permettait ainsi d'éviter les arrêts en cours de film pour changer la bobine. Et il sera également le premier cinéma équipé parlant en 1931.
Changements de mains
Bientôt un troisième cinéma va ouvrir ses portes, derrière le garage Citroën de la rue de la République. Son propriétaire, Mangin, veut en faire le plus grand de Vierzon. Il portera le nom de Mac Nab et sera inauguré en juin 1940... par les troupes allemandes.
Mangin le cède à Lionel Bonnard en 1955, qui le revend à la ville en 1968. Les successeurs des frères Lavezard, deux dames, Guillaume et Lavezard, rachètent alors le fonds ciné du Mac Nab et s'occupent de la programmation de leur Carillon.
Ce dernier passe dans les mains de la famille Toyot en 1974. Les Toyot avaient fermé le Casino lorsqu'ils avaient créé le Miramar en 1951, futur France, avenue de la République. C'est ainsi que le Carillon changera de nom en 1976 pour prendre le nom de France 2.
Vingt ans et une crise du cinéma plus tard, le Carillon – France 2 ferme définitivement ses portes. Nous sommes en 1998. Il est sauvé de la démolition par un passionné qui le transforme en musée privé.
Aujourd'hui, quelques chanceux peuvent encore le visiter à l'occasion des journées du patrimoine, en septembre. Cela vaut le coup d'oeil, nous ne sommes pas loin de l'ambiance « Cinéma Paradiso »...
Après une journée de grève générale le 13 mai, les événements vont s’accélérer au niveau national et entraîner des répercussions à Vierzon.
Le 17 mai, le conflit étudiant se prolonge par un conflit ouvrier : Renault se met en grève, cette régie dont on dit que si elle tousse, c’est la France entière qui s'enrhume. Georges Pompidou, alors Premier Ministre, est obligé de lancer les négociations de Grenelle.
À Vierzon, les usines vont se mettre en grève les unes après les autres, entre le 18 et le 25 mai, non pas forcément pour approuver les revendications étudiantes mais bien pour manifester en faveur d’une hausse des salaires.
Le Berry Républicain devient ce jour-là le baromètre des usines en grève. La première à débrayer est Unelec (à 100%) le 18 mai. « Chez Nadella on a observé un mouvement d’une heure, la gare s’y prépare », annonce la presse.
La gare à la pointe de la contestation
Le lundi 20, le gros titre du BR est le suivant : « Occupée depuis samedi matin par les cheminots, la gare est devenue le bastion du mouvement social à Vierzon. A 8 heures du matin, les cheminots informaient Pierre Boué, chef de gare principal, qu’ils se mettaient en grève et qu’ils occupaient tous les locaux. » Plus aucun train ne sort de Vierzon. Le BR de signaler aussi qu’ « un drapeau rouge avec inscription révolution et liberté, flottait depuis samedi sur le clocheton du LTE. »
A noter que ce jour-là également Nançay est en grève : « Les personnels de l’observatoire de Meudon sont en grève. En conséquence, ils ont décidé de se réunir pour se consacrer à la remise en question des structures dans lesquelles ils vivent, et à travailler à leur remplacement. » En fin d’article : « Meeting du PC ce soir à l’auditorium. »
Cinq mille manifestants
21 mai : « Plus de cinq mille vierzonnais ont cessé le travail et occupé les usines. » S’ensuit la longue liste des grévistes. Les porcelainiers de la CNP ont fait savoir qu’ils rejoindront le mouvement un peu plus tard, tributaires qu’ils sont des fours qu’ils ne veulent pas saboter. Les municipaux se sont mis en grève, assurant un service minimum pour l’état civil. Seules les chambres froides de l’abattoir fonctionnent.
D’autres usines sont totalement fermées : Apia, Abex, Compagnie des compteurs, Unelec, Fulmen, Tréfilerie, Nadella, Paulstra, Tarc, Ruhlmann, Meubles Veillat, Case, Pierre Renaud, Biraghi-Entrepose. Les 22, 23 et 24 mai, la situation est quasi inchangée, des manifestations avec défilés ont lieu en ville.
Le 24, le BR note néanmoins que « le conseil municipal vote 100 000 francs pour les familles des travailleurs. » Le lendemain, samedi 25, un grand bal populaire et gratuit a lieu le soir sur la place de la Libération.
De plus, de nouveaux débrayages ont lieu : Pica, LBM, Ecimo, Robinetterie Bouttevin, Montjoie, Galopin, Nozal, dans les entreprises de confection. On note également « une heure de débrayage à l’hôpital. » L’article se conclut sur cette note : « 98% des vierzonnais sont en grève. »
La grève arrive à son maximum à Vierzon. Mardi 28 : « cinq mille personnes dans la rue, samedi. En signe de solidarité, les commerçants avaient baissé leur rideau. » Les porcelainiers ont ouvert des négociations avec la Chambre syndicale de la céramique présidée par Monsieur Taillemite. Les revendications portent sur un hausse des salaires de 2,30francs de l’heure.
Le 29 mai, la grève s’étend toujours, gagnant les ouvriers du bâtiment et même les artisans. C’est ce jour que le Général de Gaulle part à Baden-Baden, chercher le soutien de Massu. Revenu à Paris dès le lendemain, il lance son « je ne me retirerai pas », qui marque le début des contre-manifestations en sa faveur.
Inutile de dire qu’il n’y en aura pas à Vierzon. C’est également le 30 que le BR note que la commission paritaire de la porcelaine a échoué à Vierzon. Un petit article annonce déjà les futures reprises : « Parmi les grévistes vierzonnais, nombreux sont ceux qui en dehors des meetings et des piquets, se livrent aux travaux de jardinage. Aujourd’hui les jardins sont propres comme des sous neufs et les chômeurs ne savent plus que faire… Parmi les revendications, on va demander une ouverture anticipée de la pêche !, déclare un gréviste. »
Reprise dès le 04 juin
Le 04 juin sonne le début des reprises dans certains ateliers vierzonnais. Après s’être mises en grève les unes après les autres, les usines reprennent également à tour de rôle. Après les 5000 manifestants du 28 mai, ils ne sont plus que 2000 à manifester ce jour. Le 5 juin Dudéffant reprend, les PTT partiellement. Les cheminots poursuivent. Le 06, « la reprise s’accentue dans l’industrie privée, bien que de nombreuses usines soient toujours en grève. » Robinet reprend, suivie d’Apia, Veillat, Case, la Pointerie.
La SNCF a repris dans le chahut. Les cheminots sont furieux d’avoir fait dix-neuf jours de grève et de reprendre alors que leurs revendications ne sont pas satisfaites. Le 07, c’est au tour de Nadella, Fulmen, et Unelec de reprendre. Le 08 juin la céramique et deux usines de métallurgie restent seules en grève. Abex reprend le 10 ainsi que les céramistes. Le 12 juin les derniers enseignants et élèves ont repris le travail au LTE. Il faut dire que les examens approchent et que les étudiants ont toujours dit qu’ils ne souhaitaient pas boycotter les concours d’entrée dans les grandes écoles.
C’est comme cela donc que ce sont déroulés les événements à Vierzon. Au-delà de cette date du 12 juin, les pages locales du BR seront à nouveau consacrées à de l’actualité moins contestataire. Pour preuve, dès le 13 juin, la une de la page Vierzon est consacrée aux fêtes de Thénioux. Et cette année-là, la vedette en a été Claude François. Sa photo occupe toute la tête de page...
Source : Le Berry Républicain, avril, mai, juin 1968
Images : Archives municipales Vierzon
A l’heure où certains philosophes et hommes politiques conservateurs accusent une génération entière d’avoir spoliée la suivante, il est bon de revenir sur les événements qui ont marqué mai 1968 à Vierzon, ce joli mois de mai qui fleure bon le muguet et le pavé.
Les premières remises en cause du gouvernement De Gaulle apparaissent lors de son second septennat. C’en est fini du consensus lié à la Guerre d’Algérie. Dès l’élection de 1965, Mitterrand le met en ballottage, chose impensable quelques semaines auparavant. La crise la plus grave dont il aura à faire face sera celle de Mai 1968 qui débute au sein de l’Université. Depuis le baby-boom des années 1945, le nombre des étudiants ne cesse de croître dans des locaux de plus en plus exigus.
Les événements commencent le 03 mai. Un meeting des étudiants interdit à Nanterre se tient alors à la Sorbonne. La police intervient, ce qui pousse les syndicats étudiants (UNEF) et enseignants (SNESUP) à lancer un mot d’ordre de grève.
C’est dans le BR des mois de mai et juin 1968 que nous allons voir comment est perçue la crise dans la seconde ville du Cher.
Sous les pavés la plage
La une du BR couvre bien les manifestations mais aucune répercussion n’est à signaler à Vierzon. Le 07 mai il est fait état de barricades, de pavés arrachés, de voitures incendiées, premiers « débordements » des manifestations étudiantes à Paris. C’est l’engrenage, la Sorbonne est bouclée. Le 11, ce sont vingt mille manifestants qui défilent à Paris. « Les 19 ponts de la Seine sont bloqués par le service d’ordre », ajoute le journal.
Suite à la répression de cette manifestation, les différentes centrales syndicales mobilisent leurs adhérents pour une grève générale le 13 mai.
C’est ainsi que le événements apparaissent pour la première fois dans la page Vierzon, le lundi 13 mai au matin. « Pour suivre les manifestants un peu partout, les étudiants de Vierzon ont décidé de répondre au mot d’ordre de l’UNEF. » Ce ne seront pas les seuls à défiler. Samedi soir, un mot d’ordre CGT et CFDT a été lancé pour la grève générale du 13 mai. Le BR rajoute : « Hier dimanche, un meeting a eu lieu à la bourse du travail appelant toutes les entreprises et administrations à la grève générale, pour la liberté et la démocratie, contre la répression. Une grande manifestation est prévue ce matin place de la Résistance, à 10 heures, après que le défilé partant du lycée Henri Brisson soit arrivé sur place. »
Le BR revient sur cette journée dans son édition du 15 : « Un long cortège d’étudiants et d’ouvriers a manifesté lundi dans le cadre de la journée de grève générale. Cette foule (NDLR 2000 selon le BR) est descendue jusqu’à l’auditorium au son de « Peyrefitte démission » ou encore « amnistie » pour écouter des orateurs qui ne sont autres que les représentants locaux des syndicats assistés des élus locaux messieurs Mérigot, Micouraud, Luberne, Patron et Rimbault. Les syndicats ont signé une résolution tendant à dénoncer « les brutalités inouïes dont ont été victimes les étudiants et enseignants. »
Des grèves bien suivies
A Vierzon, les grèves ont été bien suivies. Au lycée, seuls les internes ont été pris en charge. Aux PTT, on ne signalait pas grande perturbation, la distribution du courrier étant normalement assurée. Au téléphone toutes les communications ont été assurées. A la SNCF la grève perturba considérablement le trafic. Sur les quais comme dans le dépôt l’activité fut très réduite tout au long de la journée. A EDF, participation très importante « mais les services de sécurité furent assurés » peut-on lire dans le BR.
Et le journal ajoutait : « Toutefois, les coupures eurent lieu tout au long de la journée ce qui entraîna la fermeture de la quasi totalité de nos usines en ce lundi. Ce premier jour de la semaine est en principe réservé à la lessive par les maîtresses de maison mais les machines à laver restèrent muettes. Au cours de l’après-midi la lumière fut rendue. »
Les ouvriers ont donc repris le travail le 14 mai. Les concernant le BR notait : « Le beau temps aidant, les ouvriers en grève (volontaire ou forcée) se rendirent dans leur jardin voulant profiter aussi pleinement que possible de cette belle journée. » Les étudiants, eux, ne sont pas retournés en cours le lendemain. L’association du supérieur technique de Vierzon poursuit ses manifestations et sa grève devient, de ce jour, illimitée...
Source : Berry Républicain, avril, mai, juin 1968
Depuis une loi de 1954, une Journée de la Déportation est instaurée en France, le dernier dimanche d'avril. Elle permet de commémorer la mémoire des victimes déportées dans les camps de concentration nazis. Et cette date de fin avril correspond à la libération de ces camps par les troupes soviétiques et américaines.
Aujourd'hui les déportés ne sont plus présents pour témoigner. Témoigner pour eux mais aussi pour ceux qui ne sont pas revenus. Seules les familles peuvent encore tenter de raconter...
Au nombre des personnes non rentrées figure madame Marie Juliette Mersey, disparue – officiellement du moins – le 21 octobre 1943 à Ravensbruck, arrêtée pour avoir favoriser les passages sur la Ligne de Démarcation.
Les informations sur son parcours sont minces. Seul existe un court article paru dans la presse en 1948, intitulé « Mademoiselle Mersey, infirmière au grand cœur ». C'était là un point de départ pour reconstituer ses principales activités de Passeur.
Marie Juliette Mersey est née en 1885 à Vierzon Villages et débute sa carrière au bureau de bienfaisance de Vierzon avant d'intégrer le comité municipal d'hygiène qui en dépend, créé par le maire Péraudin. Durant la Première Guerre Mondiale, elle devient bénévole à l'hôpital de Vierzon. Les trois hôpitaux temporaires, l'hôpital municipal et le centre de tri en gare de Vierzon étaient en effet demandeurs de main-d’œuvre et beaucoup de dames de Vierzon se sont retrouvées infirmières de fait, apprenant le métier au jour le jour. C'était le cas de Marie Juliette Mersey qui avait eu un embryon de formation médicale au comité d'hygiène.
Lorsque la Deuxième Guerre a débuté, elle a repris son activité d'infirmière. Les pilonnages de la Luftwaffe allemande des 15 et 17 juin, furent meurtriers en ville. Les derniers combats pour la défense de Vierzon les 18 et 19, également. Marie Juliette Mersey, avec l'ambulance municipale, allait alors dans les rues relever les corps pour les entreposer à la morgue.
Sitôt la Ligne de Démarcation mise en place, fin juin 1940, elle entreprit d'organiser les passages clandestins. Le quartier de Bourgneuf, en zone libre, ouvrit un centre pour les réfugiés, salle Collier. Il lui permettait d'avoir une bonne raison d'effectuer de nombreux aller-retours quotidiens en zone libre, allant soigner les malades de passage. Déjà elle cachait une activité annexe : le passage de prisonniers français évadés.
Sur cette activité clandestine, elle n'a jamais parlé à qui que ce soit. La filière qu'elle a eue l'idée de créer est connue grâce aux personnes qui y ont participé : le notaire Garapin, le verrier Thouvenin, mais aussi et surtout les docteurs Szumlanski, Mérigot, et Cliquet. Ce dernier faisait partie du réseau belge des passeurs « Pat'O Leary », réseau qui utilisait – entre autres – les stratagèmes de Madame Mersey.
Son principal stratagème est lié à sa fonction d'infirmière. Elle utilisait l'ambulance municipale pour évacuer des faux blessés convalescents en zone libre. Elle les badigeonnait de mercurochrome, de bandages et pansements divers avant de les allonger sur la civière de l'ambulance et de passer la ligne ainsi. Elle allait jusqu'à sermonner les douaniers allemands s'ils prenaient un peu trop de temps à vouloir inspecter le blessé ou regarder de trop près les vrais-faux ausweis. L'article de journal raconte qu'une fois elle était assise sur un coffret de 76 vraies-fausses cartes d'identité lorsque les douaniers ont eu l'idée de fouiller l'ambulance. Elle n'a pas bougé d'un poil, gardant tout son sang froid.
Une autre tactique était le transport de malades soi-disant contagieux. Les Allemands ayant peur de la contagion, le passage de la Ligne était en général plus vite expédié.
Les blessés et malades recouvraient rapidement la santé après le passage clandestin. En effet, elle habitait en zone libre, en bas de l'avenue du 14 juillet. Elle permettait aux clandestins de prendre du repos, un repas, de se laver et se changer avant de reprendre la route pour le Sud.
Ce stratagème de l'ambulance n'était pas le seul utilisé par « l'infirmière au grand cœur ». La famille avait été mise à contribution. Le Père Mersey habitait en zone occupée et avait pour habitude recevoir ses petits enfants pendant les vacances. Le petit-fils, aujourd'hui âgé, se remémore aujourd'hui la scène suivante.
Mais il faut d'abord savoir que la frontière zone libre / zone occupée était matérialisée par des barricades en bois. Si les échanges verbaux, entre les familles séparées par exemple, étaient tolérés des Allemands, le franchissement était strictement interdit.
Le frère et la sœur sont en vacances chez les grands-parents Mersey, rue du cavalier. Un jour ils sont envoyés chez la cousine, avenue du 14 juillet. La cousine les emmène le long des barricades. Ils ont la surprise de voir arriver leur grand-père accompagné de deux enfants, fille et garçon, de l'autre côté de la barricade. La conversation s'engage. D'un seul coup les deux enfants sont violemment poussés par la cousine sous la barricade pendant que le grand-père faisait de même de l'autre côté.
Le petit-fils se demande toujours aujourd'hui qui pouvaient être ces deux enfants qui étaient du même âge que lui et sa sœur. Il imagine des enfants de « personnalités » ou encore juifs...
Marie Juliette, Claire dans la Résistance, exercera son activité de Passeur durant tout le temps de l'existence de Ligne de Démarcation, jusqu'au 31 mars 1943. À cette date, la gestapo arrête un Anglais avec un papier plié dans sa poche. Sur le papier, le nom et l'adresse de Marie Juliette. La gestapo vient l'arrêter chez elle avenue du 14 juillet.
Elle est rapidement transférée à la prison de Fresnes, puis déportée en Allemagne. Elle est officiellement décédée à Ravensbruck le 21 octobre 1943, à l'âge de 58 ans.
Les dernières nouvelles reçues par sa famille sont un mot qu'elle a pu faire passer à son frère alors qu'elle était à Fresnes. Il était écrit : « Ne vous en faites pas pour moi. J'espère que vous allez bien et que vous n'avez pas trop d'ennuis à mon sujet. Je m'en excuse ».
Images : Le Berry Républicain - Archives municipales Vierzon
Dans l'arrondissement de Gien, sur le bord de la Loire, il existe un petit prieuré dédié à Saint Gondon (Gondulfus). Cet établissement sera l'objet d'une querelle, au 11e siècle, entre deux abbayes : Saint Pierre de Vierzon et Saint Florent près Saumur.
Le petit prieuré des bords de Loire a été érigé dès le VIe siècle autour du tombeau de Gondon, évêque lombard qui avait fui les persécutions de la secte des ariens. Ayant rapidement adopté la règle de Colomban puis de Benoît, le prieuré fut officiellement donné aux moines de Saint Florent du Montglonne près Saumur. Nous sommes en 866 et cette donation est faite par le roi Charles le Chauve, petit fils de Charlemagne. Les moines de Saumur doivent pouvoir s'y installer et y transporter les reliques de Saint Florent après que leur abbaye du Montglonne ait été détruite par les Normands.
Il est bon de rappeler que la même mésaventure est arrivée aux moines de Vierzon. Quelques 20 ans auparavant, en 843, ce même roi de la Francia Occidentalis fondait une abbaye bénédictine à Dèvres (Saint Georges sur la Prée). Cette dernière s'était alors transportée en 903 à Vierzon, les moines ayant fui devant les Normands.
Comment ce monastère est-il tombé entre les mains des moines de Vierzon ? C'est une charte du cartulaire de Vierzon qui va nous renseigner sur l'évolution de la propriété de Saint Gondon durant le siècle précédent.
On y apprend que Louis, fils de Charles III le Simple est moine de Saint Gondon. À son accession au trône de France sous le nom de Louis IV d'Outre-mer en 946, il donne l'abbaye à Geoffroy, vicomte de Bourges. La suite, c'est la charte qui nous le raconte :
« Geoffroy dit Papabos aïeul de notre père Geoffroy, avait reçu en alleu cette abbaye de son seigneur Louis Roi de France. Il la laissa en mourant à son fils Geoffroy dit Bosberas, lequel à son tour la transmit à son fils Geoffroy le Noble, d'où par héritage elle échut à mon père Geoffroy le Méshin, puis à moi (Etienne vicomte de Bourges) ».
Cette charte date de 1082. Outre l'origine de propriété, elle mentionne la donation du prieuré de Saint Gondon aux moines de Saint Pierre de Vierzon par Etienne vicomte de Bourges.
Cela fait donc un siècle que les moines de Saint Florent près Saumur n'ont plus la jouissance des biens de leur prieuré de Saint Gondon qui est tombée entre les mains de la vicomté de Bourges.
En 1082, le cartulaire de Vierzon mentionne un autre puissant du royaume, qui témoigne et confirme la donation à Vierzon. C'est Gilon de Sully, gendre de Etienne. Ce personnage est d'autant plus important qu'il aura un rôle déterminant pour la suite des événements.
La charte suivante du cartulaire de Vierzon (non datée mais certainement de 1088 ou 1089), est la confirmation de la donation par l'héritier de Etienne, Eudes Arpin, vicomte de Bourges. Humbaud abbé de Vierzon se voit confirmé dans cette possession, à charge pour lui d'inclure Arpin dans les prières qu'il doit déjà faire pour le repos de l'âme de son oncle Étienne.
Mais la suite de l'histoire est à rechercher non plus dans le cartulaire de Vierzon mais dans celui de Saint Florent près Saumur. Le moine Louis devenant roi de France en 946 avait-il le droit de donner le prieuré au vicomte de Bourges ?
Huit chartes du « Livre Noir » de Saumur, datées de 946 à 1082 mentionnent des tentatives pour les moines de Saumur de se voir reconnus les vrais propriétaires de Saint Gondon.
Bien qu'ayant exhibé leur acte fondateur signé Charles le Chauve fondant le prieuré pour les moines de Saumur, le pape tergiverse, tant il est vrai qu'il n'est pas facile d'aller contre la volonté royale.
La donne change en 1082. Il n'est plus question de plaider contre la volonté de Louis IV roi de France mais de plaider contre une autre abbaye. Saint Florent de Saumur va alors aller en justice contre Saint Pierre de Vierzon.
Et l'archevêque de Bourges en sera l'arbitre.
Trois chartes de Saumur montrent l'accord passé entre ceux de Saumur et ceux de Vierzon. L'accord sera également transcrit dans le cartulaire de Vierzon, dans sa charte numéro 65.
Saumur abandonne totalement ses prétentions sur Saint Gondon, reconnaissant que les moines de Vierzon ont beaucoup investi pour remettre le prieuré en état. Néanmoins, les moines de Vierzon devront acquitter à perpétuité une rente de 2 onces d'or « bon et légitime » à ceux de Saumur tous les 6 mai, fête de saint Florent, « en reconnaissance de leurs anciens droits ».
Il est précisé que si les moines de Vierzon « manquent à cette convention et s'ils négligent d'en remplir les conditions, alors les moines de Saint Florent rentreront dans leurs droits et récupéreront ledit monastère avec ce qui en dépend, tandis que les moines de Vierzon n'auront plus rien à y prétendre. »
Cet accord fut ratifié trois fois en janvier 1095 : une fois devant l'archevêque de Bourges, une fois devant le chapitre de Saint Pierre de Vierzon et une dernière fois devant le chapitre de Saint Florent de Saumur.
Pourtant les choses n'en sont pas restées là. Mais le cartulaire de Vierzon ne mentionne aucune suite. Il faut la chercher à Saumur.
Dès la première année les moines de Vierzon n'ont pas donné leur 2 onces d'or (50 grammes environ) à ceux de Saumur. Les chartes de Saumur montrent une tentative de médiation, donnant un délai de paiement à Vierzon pour rassembler cet or.
La médiation échoue, Vierzon refuse (ne peut pas?) payer.
Les moines de Saumur font alors appel à Gilon de Sully pour récupérer Saint Gondon. Rappelons que Gilon est le gendre d'Etienne de Bourges, témoin de la donation de 1082.
Gilon de Sully est un personnage important de par la situation géographique de sa seigneurie qui englobe Saint Gondon.
Après avoir assisté à la donation de son beau père aux moines de Vierzon, Sully devient le principal acteur de la restitution à Saumur.
Dans les chartes qui narrent cette restitution, il n'est plus question du vicomte de Bourges, comme si Eudes Arpin avait disparu. Nous ne saurons donc jamais quelle fut sa position vis à vis des moines de Vierzon, ses protégés.
De fait, Vierzon ne paye pas à Saumur ses deux onces d'or. Saumur prend à témoin Gilon de Sully qui prend fait et cause pour Saumur et atteste de la rupture de contrat entre les deux abbayes. Mieux, c'est Gilon de Sully qui restitue Saint Gondon à Saumur dès juillet 1095. Et il promet qu'il intercédera auprès de l'archevêque de Bourges en leur faveur.
On apprendra tout de même que Sully a obtenu de Saumur la modique somme de mille sous en or (4,5kg), en échange de la restitution de Saint Gondon.
Gilon a tenu parole et a plaidé leur cause auprès de l'archevêque de Bourges.
Après une dernière tentative de se voir confirmer la possession de Saint Gondon en 1099 devant la juridiction archiépiscopale de Bourges, Herbert, abbé de Vierzon, doit contresigner la charte de Saumur, acceptant la restitution à Saumur...
Images : Bibliothèque Nationale : Mns lat 9865.
Une transcription latine existe : Guy Devailly, Le cartulaire de Vierzon, Paris, 1963
La traduction en français reste à faire.
Une rue à Vierzon porte son nom depuis 1892.
Mais au fil des ans les mémoires s'estompent, les vierzonnais ont oublié qui était ce personnage – Armand Brunet – qui a donné son nom à la rue vierzonnaise où il demeurait.
Sur certaines cartes postales anciennes des années 1900 il existe deux maisons accolées dans cette rue appelées « les maisons Brunet », résidence de la famille du même nom depuis la Révolution Française. Mais l'une d'elle a été détruite en 1905 et la maison subsistant a toujours coutume d'être appelée – à tort – « la maison de Jeanne d'Arc ».
Si Jeanne est plausiblement passée par Vierzon en 1429, une erreur de localisation a fait de cette maison celle où elle aurait passé la nuit.
Il est plus vraisemblable que Jeanne d'Arc se soit arrêtée à l'auberge de « la Madeleine », deux maisons plus loin, intramuros, sur la route de Bourges.
La principale maison Brunet encore visible aujourd'hui porte le vrai nom de « maison des vicaires ». Et c'est sous ce nom qu'elle apparaît sur un plan du XVIIe siècle.
Les vicaires qui desservent les différentes chapelles de l'église Notre Dame sont, dans les faits, inféodés aux moines bénédictins de Saint Pierre dont l'abbaye est toute proche (hôtel de ville). À ce titre les moines les logent dans une maison leur appartenant, moyennant un loyer pris sur les revenus des vicairies.
La Révolution Française a autorisé le changement de main de toutes les propriétés de l'abbaye lors de la vente des biens du clergé comme Biens Nationaux, entre 1791-1793.
C'est alors que rentre en piste les ancêtres d'Armand Brunet, par ailleurs connus à Vierzon : les Gourdon, dont un membre de la famille a lui aussi donné son nom à une rue. Bourgeois, commerçants ayant acquis la noblesse de robe, ils ont donné de nombreux officiers à la ville, dont la maîtrise des eaux et forêts.
René Gourdon de Sigougnol, premier acquéreur de la maison, est mort peu de temps après, laissant la succession à ses trois enfants, dont sa fille mariée à un Grillon d'Anvault.
La maison sera dorénavant appelée Grillon d'Anvault jusqu'en 1870 où une nouvelle branche s'y installera : les Brunet d'Anvaut.
L'aîné, Armand Brunet – notre Armand Brunet – rachète à ses frères et sœur leur part sur la maison et en devient l'unique propriétaire. Très conservateur, soucieux de maintenir les lieux à l'identique des décennies précédentes, il ne pourra tout de même pas aller contre la dispersion du mobilier, « chacun voulant sa part ».
Du mobilier fastueux des Grillon d'Anvault, il ne restait plus grand chose en 1870. Armand Brunet parle même d'un « mobilier vieux et presque inserviable ». Quant à la maison dont on sait qu'elle avait « été remise en état en 1805 », Brunet la décrit en ces termes : « la décrépitude du bâtiment devient plus sensible. C'est maintenant un vénérable souvenir ».
Armand a reçu une stricte éducation religieuse chez les Jésuites. Son testament soulignera sa religiosité. Puis en grandissant il devient magistrat, gravissant tous les échelons, avocat, etc... avant de finir sa carrière dans la peu d'un conseiller de la Cour de Bourges.
Par contre il ne fallait pas lui parler finances. La tradition familiale montre un homme qui ne tenait jamais ses comptes, qui oubliait même les placements, souvent aléatoires, qu'il avait pu faire ; ses héritiers retrouveront même un gestionnaire de biens dont Brunet avait oublié jusqu'à l'existence.
Lorsque Armand meurt en 1892, il fait une donation à l'abbé Bedu, curé de Notre Dame, pour qu'il restaure la chapelle Sainte Perpétue. En souvenir de cette donation, Bedu fait graver les armoiries
des Brunet sur une colonne de la chapelle, à un tout petit détail près...
Armand brunet s'était fait faire des armoiries spécifiques, confirmées par d'Hozier ; il s'agissait d'une tête de Maure pour rappeler ce nom de Brunet.
Mais nous sommes en 1892, en plein colonialisme chrétien. Et pour Bedu il est impensable de mettre la tête d'un Noir, d'un sauvage, sur une colonne. Ni une ni deux, il a blanchi la tête pour la rendre plus présentable en cette période...
Mais Brunet lègue la quasi totalité de sa fortune à l'hôpital et c'est ce don qui va déclencher la dénomination d'une « rue Armand Brunet », ex rue Saint Pierre.
En effet il donne une importante somme d'argent afin que l'hôpital érige un nouveau bâtiment qui sera chargé de soigner les vieillards. Il donne également une rente afin d'entretenir douze lits. Au dessus de cette nouvelle salle, il y avait le souvenir de la donation dans un cartouche : « fondation de monsieur Armand Brunet, en souvenir des familles Gourdon, Grillon d'Anvault, Brunet ».
Mais son éducation religieuse ressort. L'hôpital devra créer un oratoire pour les religieuses chargées des soins aux malades. Elles devront dire une messe annuelle « récitée à haute voix » par les religieuses. Et si une jour l'hôpital venait à être laïcisé, le legs n'aurait plus cours et la rente reviendrait aux héritiers Brunet.
Quant à Armand lui-même, sa dernière volonté fut de léguer son corps à la médecine « pour telles expériences que bon lui semblera ». A charge ensuite pour sa famille de larguer le corps en pleine mer. Cette dernière partie des volontés du défunt ne fut pas exécutée...
Images : Archives municipales Vierzon
Décidément, le tribunal de bailliage est une source inépuisable pour connaître le quotidien de nos ancêtres vierzonnais sous l'Ancien Régime, du 16e siècle à la Révolution.
Retour aujourd'hui sur une histoire de gros sous, un héritage entre le bourgeois Nicolas Agard, sa fille et son gendre honni.
Avant ce mois de juillet 1607, nous ne savons pas où habitait la famille de Nicolas Agard. Mais nous savons par les archives que cette famille a donné bon nombres d’officiers municipaux aux 15e et 16e siècles, des grènetiers à sel, des échevins, même des baillis. Grâce à son frère Clément « bourgeois en cette ville », nous savons que les Agard sont venus se retirer dans le lieu qui leur appartient, le « lieu des Roziers », en juillet 1607.
Clément donne les raisons de ce déménagement au bailli. Il explique que Nicolas et sa famille étaient sur leur terre (il n’est pas précisé où) mais qu’ils sont venus aux Roziers « à cause de la contagion qui estoit lors en cette ville (une épidémie de peste noire a lieu à Vierzon en 1607) ».
Nicolas, certainement déjà atteint, va trouver son frère « et lui met entre ses mains un parchemin clos, scellé du sceau dudit Agard, le priant le conserver jusqu’à son décès si Dieu faisait son commandement de lui, lui disant que c’était son testament et ordonnance de dernière volonté lequel il aurait écrit et signé de sa main et voulait qu’il fût exécuté de point en point selon sa forme et teneur. »
Mort de contagion
Nous sommes le 28 juillet et Nicolas Agard est mort hier « en cette ville de la dite maladie contagieuse. » Clément a mis le testament entre les mains du bailli, chargé de l’ouvrir et de s’assurer que le parchemin n’a pas été descellé : « le parchemin scellé en la même forme et au même état qui lui a été mis entre les mains par le défunt, jurant et affirmant qu’il n’a été ouvert ni vu par aucune personne que ce soit. Nous a requis ouverture être présentement faite pour en être judiciairement fait lecture et être enregistré au registre de notre greffe pour y avoir recours et servir à qui il appartiendra. »
Le bailli décachette donc le parchemin et en fait lecture devant Etienne Rousseau, Pierre Agard et Jacques Simon, héritiers présumés. Aucun n’a fait de commentaire à la lecture sauf Etienne Rousseau qui a protesté, a dit « que le testament est nul et veut le faire déclarer nul en temps et lieu. »
Pourquoi cette colère ? Suivons la teneur des dernières volontés du défunt.
« J’entends que Nicolas Agard mon fils ait la moitié de la métairie des oliviers comme elle m’est advenue et partage avec mes enfants les meubles qui sont dedans. Je veux pour récompenser Pierre Agard Catherine Agard et Nicolas Agard qu’ils prennent tous trois la somme de 1500 livres. Idem veux et entends que ma servante Nicolle aye une maison qui est au dedans de la montagne du cloux du roy sa vie durant et que on lui paye ses services honnestement ».
« le testament est nul ! »
L’affaire se corse lorsque Nicolas Agard écrit sur le procureur du roi (officier de bailliage), son gendre. Il commence par sa servante, voulant « que personne n’aille point la tourmenter d’autant que le procureur du roi la menace de la ruine. »
De poursuivre par ses dernières volontés concernant sa fille Marie Agard et le procureur du roi : « que le procureur du roi, mari de ma fille Marie Agard prenne aucune chose ».
On l’aura compris, son gendre n’est autre qu’Etienne Rousseau, le procureur du roi en poste au bailliage de Vierzon depuis 1598 et qui le restera jusqu’en 1616, date présumée de sa mort.
Mais pourquoi Nicolas Agard a-t-il une dent contre son gendre ? Il s’en explique dans les lignes qui suivent. « D’autant que lui et ma fille Marie m’ont fait des menaces de me ruiner même que le procureur m’a dit des injures au mitan des barres de cette ville (?) et a voulu vendre mes enfants. » S’ensuit une longue litanie sur les actions de son gendre. Il décrit également qu’il a déjà plaidé contre lui mais qu’entre gens de justice ils se sont entendus. Il poursuit : « tous les commis de justice étant pareils, il vaut mieux noyer ses filles que de les donner à de tels gens. » On voit tout le mal que pense Nicolas de son gendre et regrette de lui avoir donné la main de sa fille.
Par contre il ne se fait pas d’illusion sur ses volontés et prévoie déjà que le testament sera attaqué : « Si la dite Marie Agard et son mari veulent plaider, je veux qu’ils n’ayent que sa légitime portion de ce qui leur appartient de droit et leur défend de mettre la main sur mes papiers d’autant qu’il est à redouter, attendu que les quittances sont dedans mes coffres. »
Le testament se termine sur une légitimation de sa position : « Je veux que on croit que ce que je dis est vérité. Il faut reconnaître les bons et les mauvais. J’ai gouverné ma vie avec honneur et ce serait injuste de donner aux mauvais comme aux bons et vous assure de la justice que ce que je donne à mes enfants est pour les bons et agréables services qu’ils m’ont faits et est ceci mes dernières volontés. »
Image : Archives municipales Vierzon
La maison des Roziers jouxtait le côté extérieur du mur de la ville, sur la route de Bourges, juste à la sortie de la porte de la Rivière ; aujourd'hui rue Armand Brunet.
Sur la carte postale ci-dessous, elle se situe à l'extrémité droite, après la maison où se trouve la tour.
On a pris l'habitude de dire que la ville de Vierzon est aussi étendue que Paris intramuros. De périf Est à périf Ouest, il faut 10 kilomètres pour traverser la capitale ; autant pour traverser Vierzon, du Coq gaulois au Village Aubry.
Dans une ville aussi étendue, les distances deviennent problématiques entre les sites de production et les lieux de l'habitat ouvrier.
Dans notre ville, les transports en commun voient le jour au tournant du 20e siècle avec le « Tacot », ce petit chemin de fer départemental d'abord destiné au transport de marchandises vers les cantons qui ne possédaient pas de gare du Paris-Orléans.
La Compagnie des tramways de l'Indre gérait depuis 1903 la ligne Vierzon – Vatan – Issoudun. Le bureau terminus était face à la gare, entre l'hôtel de Bordeaux et le hall de la Société Française.
Dans les années 1910, l'automobile s'installe en France, deuxième pays producteur. De nouveaux véhicules voient également le jour : le camion et le car, boostés par la Première Guerre Mondiale, dont les demandes vers ce type de véhicules vont croissant. C'est même la multiplication des camions et des cars sur les routes de l'entre-deux guerres qui sonnera la glas du tacot.
En attendant, à Vierzon, tous les moyens sont bons pour raccourcir les distances, grâce au vélo, tout d'abord. Mais c'est un moyen de locomotion encore onéreux au sortir de 1918. Toutes les familles ne peuvent pas se le permettre.
Quant au tacot, il relie les quartiers de Bourgneuf à la gare par la rue des ponts et la rue de la République. Mais les autres quartiers (communes) ne sont pas desservis, notamment les Forges.
Il existera bien un deuxième tronçon de Vierzon Villages (place du tacot) à Neuilly-en-Sancerre par les Forges mais la ligne arrivera tardivement (1923) et le tracé ne sera même pas totalement achevé dans les campagnes.
C'est la municipalité de Maurice Nivet à Vierzon Forges qui va être à l'origine de la première ligne d'autobus public. Il s'agit de relier la gare à Vierzon Forges, 8 fois par jour. Le service est concédé à Vallin, garagiste à Vierzon Vierzon Ville (concessionnaire Citroën), à partir du 15 juin 1926.
Les arrêts sont alors : les Bourbiers, Village Aubry, en face de chez Moreau (?), les grands moulins, le petit Paris, la gare. Pour la totalité du trajet, comptez 20 minutes et 1,25franc, soit 25 centimes d'un arrêt à l'autre.
C'est tout de suite le succès mais il y a un hic. Vallin ne possédant pas d'autobus, il en a acheté un. Il coûte cher en prix de revient et la municipalité pense à acheter son propre autobus. Des subventions sont recherchées auprès de la municipalité de Vierzon Ville mais aussi des industriels qui pourraient mettre la main au porte-monnaie.
En 1928, Maurice Nivet a pris des renseignements auprès de la commune de Colombelle, dans le Calvados. Cette dernière exploite le service d' »autobus en régis municipale et en est fort satisfaite. C'est dans cette direction que souhaite se diriger la commune de Vierzon Forges. Le maire signale également que, vu le succès du service, il ne faut absolument pas qu'il soit interrompu. Cela implique qu'il faut qu'il y ait un autobus de secours dans le garage municipal.
Dans sa séance d'octobre 1928, le conseil municipal acte la création de la régie municipale de l'autobus et son budget. Le conseil acte également l'achat d'un autobus neuf. Enfin il sera demandé combien Vallin consentirait à revendre son autobus à la ville, autobus qui servirait d'autobus de secours.
C'est ainsi qu'en mars 1929 la municipalité de Vierzon Forges se voit propriétaire de deux autobus : le vieux Latil de Vallin mais aussi un Saurer tout neuf qui assurera le service.
Jusqu'à la réunification de 1937, le service en restera là. Il n'y aura jamais qu'une seule ligne, les Forges – la gare.
Lorsque Georges Rousseau est élu maire du Grand Vierzon, des discussions ont eu lieu au sein du conseil pour élargir le réseau. Un deuxième autobus – d'occasion – avait même été acheté. Mais la guerre a enterré ce projet comme tant d'autres.
L'élargissement du réseau se fera en 1947, sous le municipal Maurice Caron. Une deuxième ligne est créée, Bourgneuf – Saint Martin. Et quatre cars assurent le service quotidien.
Après 1959, le service de car évoluera en fonction de l'avancée des travaux dans les quartiers nouvellement urbanisés (Colombier, Sellier, Clos du Roy, Chaillot...)
Le service actuel avec ses trois lignes est arrivé après mai 1968, remanié en 1979.
Ligne 1 (noire) : ZI les Forges – Giraudière
Ligne 2 (verte) : Chaillot – Sellier – Rond Point Coop
Ligne 3 (rouge) : Les Bruyères – Rond Point Coop
Ligne 4 (bleue) : Croix moreau – Bois d'Yèvre – Forges ZI (par intermittence)
En 1984 et pour se mettre en conformité avec la loi, le service doit être concédé. Des entreprises sont contactées. C'est la CGE Automobiles qui est choisie.
Et dorénavant le réseau s'appellera TUV, Transports Urbains Vierzonnais.
Puis Bus Vallée...
Enfin le VIB'...
Images : Archives municipales Vierzon
Depuis les Guerres Puniques, 166 av JC, Carthage est soumise à l’autorité romaine et devient une province de l’Empire, la province d’Afrique.
L’Empire Romain est caractérisé par une religion officiellement panthéiste. La religion du Christ se développe depuis la Palestine jusqu’en Afrique par l’Egypte, et jusqu’en Europe par la Grèce.
Il faut attendre 313 et l’empereur Constantin pour que la religion chrétienne soit autorisée.
Aux premier et deuxième siècles, les premiers chrétiens sont des chrétiens qui se terrent, pratiquant leur religion dans les caves des centres urbains. Au nom du Dieu unique ils ne reconnaissent pas la personnalité divine de l’Empereur. Les premiers chrétiens sont donc persécutés pour ne pas reconnaître la personnalité divine de l’Empereur, véritable dieu sur terre, accusés de vouloir déstabiliser l’Etat.
Carthage
A Carthage, une communauté chrétienne survit tant bien que mal. Cette province d’Afrique et sa capitale sont entrées dans le giron romain après les Guerres Puniques (166 av JC).Des autels sont érigés chez des particuliers. Ils déménagent sans cesse dans un macabre jeu du chat et de la souris.
Dans ce contexte, Perpétue est une jeune fille d’une famille de la noblesse locale. Convertie au christianisme par son confesseur Satur, elle entraîne également sa servante : Félicitée.
En 203, les chrétiens sont martyrisés dans le cirque de Carthage. Le père de Perpétue, ayant des fonctions administratives importantes ne fera rien pour sauver sa fille.
Perpétue, Félicitée, Satur, ainsi que d’autres chrétiens sont tués par le piétinement d’une vache sauvage, achevés par le glaive romain.
Reliques
Les premiers martyres chrétiens sont l’objet d’un culte. Ils montrent au restant des fidèles « le bon chemin vers le royaume de Dieu ».
Lorsque la religion d’Etat devient le christianisme, les successeurs de Saint Pierre s’installent au côté de l’Empereur, à Rome. Les papes y installent leur gouvernement. Pour perpétuer le souvenir des martyres des premiers chrétiens, les papes organisent leur canonisation et font rapatrier les reliques jusqu’à Rome.
Dans les provinces puis dans les royaumes dits barbares, la diffusion du christianisme va se faire par un courant monastique important. Là où des moines s’installent, un groupe de fidèles suit et une première communauté se crée qui grossit et essaime...
Les moines de Vierzon
A Vierzon, la christianisation a eu lieu quelque part au 7e siècle, véritable siècle de la christianisation du Berry. Selon la tradition, un premier lieu de culte chrétien a été érigé sur la butte de Sion, à l’emplacement d’un ancien lieu de culte païen.
C’est au tout début du 10e siècle que des moines bénédictins vont s’installer à Vierzon dans la durée. Ils n’arrivent pas seuls.
Lorsque Charles le Chauve avait fondé une abbaye en 843, l’archevêque de Bourges Raoul de Turenne leur avait donné des reliques de Optat et Perpétue.
Depuis ce jour, Perpétue est devenue la patronne de la communauté urbaine de Vierzon ; au fil des siècles, on lui attribue quelques « miracles ».
Dévotion
Perpétue fait alors l’objet d’une vraie dévotion.
Le reliquaire de Perpétue est conservé au sein de l’église Saint Pierre des moines de Vierzon. On le sort tous les sept mars dans une grande procession à travers toute la ville, y compris dans ses lieux les plus reculés comme Dournon. On la fait également traverser les ponts sur l’Yèvre et le Cher pour qu’elle protège des crues. Les moines y assistent, le seigneur castral également, suivis de toute la population, en cortège.
En temps que protectrice, on lui fait confiance pour atténuer les maux de la ville qui sont de quatre espèces : les épidémies, les crues, les incendies, les passages des troupes amies ou ennemies.
La Révolution Française
Les derniers moines quittent leur abbaye au printemps 1790. On transporte alors le reliquaire dans l’église Notre Dame
1792 : Par peur de l’expansion des idées révolutionnaires dans toute l’Europe, les monarchies voisines font la guerre à la France. Le pays inaugure alors la conscription. Mais il faut des armes. Les cloches des églises Notre Dames et Saint Pierre seront fondues en canons à la fonderie de La Charité.
Il faut également de l’argent pour faire la guerre. Les effets d’or et d’argent des églises seront réquisitionnés. Le curé Vaillant appellera les vierzonnais à le soutenir pour empêcher que le trésor de reliquaire ne soit rapatrié à Orléans. Des émeutes suivent, la troupe intervient et reste à Vierzon pendant un mois pour maintenir l’ordre ; mais Vaillant a gagné, après avoir un temps caché le reliquaire de Perpétue, il a de nouveau réintégré l’église Notre Dame où il se trouve toujours aujourd’hui...
De la rue Victor Hugo, il n'existe aucune image spécifique. Elle fut purement et simplement oubliée de tous les photographes et éditeurs de cartes postales du début du 20e siècle. Tous juste aperçoit-on son débouché sur la rue de la République, à quelques encablures de la Croix Blanche, lieu de fondation d'un monastère qui a donné son premier nom à la rue. Peut-être était-ce dû à la mauvaise réputation du quartier, considéré, au 19e siècle, comme mal famé.
1620 : en grande pompe l’archevêque de Bourges vient consacrer l’église saint Claude que les moines capucins viennent d’ériger dans leur nouveau monastère. En effet ils se sont installés à Vierzon en 1612, accueillis par une population vierzonnaise qui leur offre les terrains de leur couvent. C’est à la Croix Blanche (actuel square Emile Péraudin), et le seul chemin d’accès est la route de Romorantin qui passe devant.
L’enclos des Capucins est alors un vaste rectangle qui va de la route de Romorantin jusqu’à un bras de la rivière d’Yèvre, près du moulin de Grossous. L’actuel triangle que forme le square Péraudin correspond en fait au cimetière des moines et a longtemps porté le nom de « Clos Labbé » puis place des Capucins avant de s’appeler place de la République (1905), et enfin square Emile Péraudin.
Le chemin de Romorantin
Àl’époque, la rue Victor Hugo ne porte pas encore ce nom. C’est le chemin de Romorantin. Partant de la porte du Dégout (bas de la rue maréchal Joffre), c’est le seul qui permet de traverser la cité médiévale de Vierzon d’Est en Ouest, par la poterne (chemin des vignes) et la grande rue (rue Maréchal Joffre). Le trajet naturel n’est pas encore celui que nous connaissons par la rue Armand Brunet et avenue de la République. C’est ainsi que le chemin portera le nom de chemin puis rue des Capucins, faisant référence à l’établissement rencontré à la Croix Blanche (du nom d'une croix blanche matérialisant l'entrée du monastère).
L’expansion du 18e siècle
Le 18e siècle est, pour Vierzon, celui de l’expansion démographique. C’est aussi celui de l’amélioration des voies de communication à travers le royaume. Vierzon en profite et la cité va dès lors endosser son rôle de carrefour routier. En 1741 le roi classe sous le nom de route royale numéro 20 la route qui va de Paris à Toulouse. Dans la foulée, c’est la route de Nevers à Tours qui est classée sous le numéro 76. Dorénavant la route de Romorantin et Tours passera par les rues Saint Pierre (Armand Brunet) et Neuve (avenue de la République). On élargit la rue Neuve qui est la première rue extra urbaine de Vierzon, la première où des maisons se construisent à l’extérieur des anciens remparts. Le nom de « neuve » n'est pas un hasard. Il s'agit de la « rue Neuve des Capucins », autrement dit la nouvelle rue qui permet d'accéder à leur couvent. Le couvent disparaîtra, pas l'adjectif de neuve.
Le roi fait paver ces voies « dont la largeur sera portée à dix mètres ». Les autres rues ne font en effet que sept mètres de large, disposition confirmée par décret impérial de 1809.
Bidonville au 19e siècle
On construit haut de gamme dans la rue Neuve. Ce n’est pas le cas dans la rue des Capucins qui connaît une construction de masse. On construit à tout va de part et d’autre de la rue, sans respect des règles architecturales, un empilement plus ou moins solide de cubes hétéroclites. Les logements sont souvent insalubres et s’écroulent régulièrement (archives municipales).
En cette fin de 18e le quartier prend l’aspect d’un bidonville que les élus tentent de résorber à grands coups d’arrêtés municipaux pour en réglementer les matériaux de construction. Il faut attendre la fin du 19e et les travaux sur l’actuelle rue Gourdon (1866) pour que la rue Victor Hugo connaisse également d’importants travaux de mise au norme des alignements.
Quant au nom même d’Hugo, les archives municipales n’ont pas conservé sa date de baptême (Hugo est mort en 1885). Tout au plus peut-on dire que la Révolution ayant débaptisé les noms à consonance religieuse, le chemin a pour un temps porté le nom de Bourchevreau.
Brèves de trottoirs
Pavage
Le pavage de la rue remonte à un arrêté municipal de 1866. Il fut terminé en 1875. La loi obligeait les riverains à paver leur propre bout de trottoir devant chez eux. Inutile de dire que certains y ont mis de la mauvaise volonté. Les archives municipales comptent de nombreuses sommations, y compris dans les années 1870-1880.
Drôle de naissance
C’est dans cette rue qu’est né un certain Bernard Giraud, plus connu sous le nom de Patrick Raynal, dit Berlodiot. C’est un humoriste bien connu dans la région, dont le texte célèbre, le cornemuseux d’marmignol, est dans toutes les mémoires (et sur internet).
Coupe-gorge
Il existait dans la rue Victor Hugo l’entrée arrière d’une maison close dont la façade principale donnait rue de la République, à l’emplacement de l’actuelle Société Générale. Il y avait là une cour avec un bâtiment au fond. La sortie discrète avait lieu rue Victor Hugo. Les plus anciens de la rue se souviennent encore des galopades des clients qui s’échappaient par l’arrière alors que la police investissait la devanture. Cela a fait partie de la mauvaise réputation de ce coupe-gorge que fut un temps la rue Victor Hugo.
Images : Archives municipales Vierzon.
Le vendredi 4 mars 1977, il y a tout juste 45 ans, les autorités locales inauguraient la nouvelle bibliothèque de Vierzon. Le maire Léo Mérigot saluait alors la réalisation depuis « si longtemps espérée » d'un équipement « enfin digne de notre ville ».
Tout le monde connaît l'humanisme de Léo Mérigot et son amour des livres. Les témoignages sont nombreux des personnes qui ont pu, passant par son domicile de la rue de l'Étape, admirer la bibliothèque dans laquelle il aimait s'enfermer après sa journée à l'hôpital. Passionné d'histoire, de sciences, il affiche un faible pour la littérature du 16e siècle, pour Rabelais en particulier, mais aussi pour les antiques. Libre penseur comme son père (instituteur), il s'intéresse également à l'ésotérisme, entretient des relations avec des groupes d'intellectuels au gré de ses voyages. Il est également un parfait connaisseur de l'astrologie et un des meilleurs analystes de Nostradamus.
Création 1905
La bibliothèque de Vierzon date en fait de la municipalité d'Émile Péraudin, maire de Vierzon Ville de 1900 à 1925. Il fonde la première bibliothèque en 1905 dans les locaux de la mairie.
La ville alors était en pleine expansion économique et les jeunes ouvriers vierzonnais trouvaient facilement du travail dans les usines locales. L'idée de Péraudin consistait en la formation des futurs ouvriers et contremaîtres. Ils devaient être suffisamment armés et formés pour entrer dans n'importe quelle usine locale. Péraudin fait alors appel à des personnalités locales pour constituer un fonds digne de ce nom. Perrin, directeur de l'École Nationale Professionnelle Henri Brisson lui établit des listes d'ouvrages dont l'acquisition serait judicieuse.
Dans cette optique également, Marc Larchevêque est consulté. Il est patron d'une usine de porcelaines et lieutenant, chef de la compagnie des sapeurs pompiers de Vierzon Ville. Larchevêque établit des listes thématiques d'ouvrages qu'il va acquérir sur ses propres deniers pour la bibliothèque : métallurgie, porcelaine, arts du feu, mécanique, dessin industriel... sans oublier la couture, l'économie domestique et les bonnes manières...
Péraudin laisse la gestion du fonds à sa femme et à son gendre, Edmond Laurençon. Ce dernier passionné d'histoire locale, écrira un court ouvrage en 1913 : « Histoire de Vierzon depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours ».
Fermeture de 1939 à 1947
La bibliothèque a la bougeotte. Lors du dernier mandat de Péraudin, le travail de bibliothécaire devient une activité annexe des employés du service état-civil qui gèrent également les prêts de livres. Les achats ne suivent plus, le nombre d'inscrits chute pour atteindre 32 en 1937.
La fusion des Quatre Vierzon en 1937 fut un nouveau coup dur pour la bibliothèque. Le rapatriement dans la mairie de Vierzon Ville des services de autres mairies de Villages, Bourgneuf et Forges a entraîné d'importants travaux de restructuration. Les livres furent alors entassés dans le grenier de l'hôtel de ville... pour être redescendus quelque temps plus tard.
Pas pour longtemps malheureusement. Le service de la bibliothèque a été suspendu à cause de la guerre. Il a fallu libérer des locaux pour l'Occupant. La bibliothèque a donc été mise en caisses et transportée en deux lieux différents en ville : la plus grande partie dans un local prêté par la Société Française, quelques caisses entreposées dans un garage municipal du Tunnel-Château.
Mais entre-temps les Allemands s'étaient servi. Ils avaient réquisitionné des ouvrages en français – beaucoup d'ouvrages scientifiques – pour le « soldatenheim », foyer du soldat, dans l'hôtel de la Rotonde.
À la Libération, le passionné de livres qu'était Léo Mérigot ne pouvait pas ne pas s'occuper de faire rapatrier les livre dispersés. Les caisses entreposées à la Société Française et celles du garage municipal ont réintégré la mairie. Il a fallu également récupérer le fonds restant de la Rotonde. La surprise fut qu'il y avait également des livres de langue allemande que l'Occupant n'avait pas emportés. Ils furent mis à disposition de Monsieur Weiss, professeur d'allemand à l'ENP., pour ses élèves. Il en reste quelques uns au fond des étagères du lycée...
Mais Mérigot n'a pas le temps de trouver un nouveau local pour la bibliothèque. C'est le municipal Caron qui va s'occuper de placer la bibliothèque municipale au premier étage de la mairie, en face de la salle des mariages. À sa réouverture en 1947 tout est à refaire. Il ne reste que 3700 ouvrages dignes de ce nom. Beaucoup ont disparu, d'autres sont obsolètes du fait de leur ancienneté.
Un effort est entrepris pour combler les dix ans de fermeture et, surtout, la bibliothèque sera dorénavant un service à part entière, complété par un règlement intérieur et des statuts votés en conseil municipal. Surtout il connaît un personnel dédié, Monsieur Lapha, qui occupe le premier poste de bibliothécaire à plein temps.
De 1959 à 1977, la longue attente
En 1959, la municipalité Mérigot hérite d'une bibliothèque qui dépasse les 1000 inscrits et les 7000 livres.
La priorité allait au logement social. Le projet engagé par Caron de détruire et reconstruire le quartier insalubre du Tunnel-Château sera achevé au début des années 1960. À quartier neuf, nouveaux équipements : la municipalité lance deux projets majeurs, un musée et une bibliothèque qui doivent voir le jour dans le quartier.
En attendant leur réalisation, Mérigot dresse le portrait robot de la future bibliothèque. « Elle doit être conçue comme un instrument de progrès idéologique et une arme de propagande » Pour ce faire, outre « les saines lectures distractives, il faut y trouver, dans les diverses disciplines, les traités suffisamment complets pour fournir toute documentation courante, sans oublier toute la littérature socialiste et marxiste... » Autres temps, autres mœurs...
Mais la bibliothèque ne vient pas. Les subventions sont inexistantes. Le ministère des affaires culturelles est pourtant créé en 1959 avec André Malraux à sa tête. Mais la composante bibliothèque n'existe même pas au sein du ministère.
La donne change dans les années 1960. Un réseau des bibliothèques s'est créé qui se dote d'une charte commune.
À Vierzon, alors que les premiers appartements du Tunnel-Château sont livrés, la municipalité entame une nouvelle réflexion : il existe toujours en ville un problème lié à la fusion des Quatre Vierzon, celui d'un centre ville mal défini. Le comblement du canal de Berry doit apporter une solution par l'implantation d'une cité administrative sur les terres nouvellement conquises sur l'eau. Le canal comblé en 1968, de nouvelles infrastructures doivent s'y développer, dont la bibliothèque qui change de lieu d'implantation. Les Vierzonnais seront attirés dans ce nouveau centre par les administrations qui s'y trouvent, puis, dans un deuxième temps par l'apport d'un commerce phare type grande surface dans le projet urbanistique du Forum République.
Après le central téléphonique en 1970, après le centre des impôts en 1975 et avant la poste et l'EDF, les travaux de la bibliothèque arrivent enfin, dus à l'architecte Serge Lana. Ils dureront trois ans.
Léo Mérigot pose la première pierre en mai 1974. Roger Faletto, maire adjoint à la culture est à ses côtés.
Un bibliothécaire est engagé, Dominique Mérigot. C'est lui qui proposera le nom de Paul Éluard comme dédicataire du bâtiment. La bibliothèque municipale est inaugurée le vendredi 4 mars 1977 en présence de l'écrivain Tahar Ben Jelloun et du poète Jean Marcenac, ami de Paul Éluard.
45 ans plus tard la bibliothèque fait sa mue. De nouveaux supports sont apparus, disponibles au prêt, cd, dvd, livres-audios, et aujourd'hui jeux vidéos et jeux de société. Il aura fallu deux ans de travaux pour pousser les murs d'un nouvel écrin qui accueille près de 90 000 documents, tous supports confondus.
Inauguration médiathèque : ce vendredi 4 mars 2022, 17h30
Semaine festive à la médiathèque : du 5 au 12 mars 2022
La médiathèque est ouverte à compter du samedi 5 mars 2022, du mardi au samedi.
Images : Archives municipales Vierzon
Difficile, dans les archives, de retrouver l'origine de la propriété de Fay (Fez dans son orthographe d'origine). Sur cette terre, le cartulaire de Vierzon (chartes de l'abbaye) ne donne aucun renseignement.
Cela semble logique, la terre de Fay, ne dépend pas de l'abbaye Saint Pierre, mais bien de la grosse tour de Vierzon, celle des seigneurs castraux.
À l'origine la propriété était plus vaste qu'aujourd'hui, englobant une grande partie occidentale de Vierzon, de la route de Tours à la route de Paris ; du Coq gaulois, à Bois Marteau en passant par la Bercetterie, Charnay et le Verdin.
Dans ces « Mémoires sur Vierzon » (1748), Béchereau avocat du roi, ne donne que deux renseignements sur la propriété. On y apprend que la source de Fay soulage le « feu sauvage » (herpès) et que l'argile qu'en en tire est utile aux faïenciers. Ses successeurs, de Toulgoët à de Kersers n'en diront pas d'avantage par manque cruel de textes.
Les de Francières
Les archives notariales donnent la propriété « du fief et hostel de Fez » à une certaine dame Margaron qui la vend au chantre de Mehun sur Yèvre en 1380.
On la retrouve entre les mains de la famille Pathofleau après 1448. C'est alors par le mariage des filles que la propriété se transmet de générations en générations.
La famille de Francières possède la seigneurie de Fay depuis au moins 1748. Ils ne sont pas des inconnus en ville. Ils apparaissent comme gouverneur de Vierzon, représentants du roi en 1500. Le plus connu des de Francières fut Robert qui prit part aux guerres de religion, dans le camp de la Ligue. Issus d'une famille de riches marchands, les de Francières possédaient également un des plus beaux hôtels particuliers du Vieux Vierzon, dans l'actuelle rue de l'étape, une sorte de palais d'hiver.
De Mac Nab à Célestin Gérard
Par un nouveau mariage, la propriété de Fay avec son étang passe dans les mains de la famille Mac Nab, en 1810. Les Mac Nab sont d'origine écossaise et l'aïeul qui fonde la branche française est un soldat (mercenaire) garde du corps du roi Louis XV.
Édouard Mac Nab sera conseiller général, deux ans maire de Vierzon Villages pendant la Seconde République, de 1850 à 1852.
Avant cela, Édouard a vu sa propriété amputée d'une grande partie sur le sud-Est. Il subit les expropriations liées à l'arrivée du chemin de fer, les lignes Orléans – Vierzon, Vierzon – Tours, et enfin la gare de triage.
Son fils – qui donnera son nom au théâtre vierzonnais – est le chansonnier Maurice Mac Nab qui fera les beaux jours du cabaret parisien « le chat noir » dans es années 1880. Il y créera « le grand métinge du métropolitain », chanson écrite pour les grévistes de la Société Française, en 1886.
Enfin, dans les années 1870, les Mac Nab vendent la propriété à Célestin Gérard, précurseur justement de la Société Française. Il avait fondé les ateliers de construction de machines agricoles face à la gare en 1848, revendus à Arbel en 1877 pour devenir la SFV...
Le château de Fay est très laid
Maurice Mac-Nab n'est pas le seul à aimer les rimes. Un jeune vierzonnais s'y essaye également, Salvinien, qui brocarde la château familial des Mac-Nab :
« Le château de Fay se dresse près d’une forêt épaisse où le gibier se presse, fait la nique au châtelain. Mais dès que l’on s’en approche, le regard, déçu, s’accroche à plus d’un détail qui cloche, autour du château de Fay, plus beau de loin que de près.
Le long mur qui s’écroule, vide hélas ! de toute foule, un petit jardin déroule son dessin sans mouvement ; dans les sentiers, l’herbe pousse comme sur les toits la mousse, une Solognote rousse en est le seul ornement, car ne sachant plus qu’y faire, le malin propriétaire a fui la saison dernière son pauvre château de Fay, plus beau de loin que de près.
Au milieu d’une clairière veuve même de bruyère, s’ouvrent maintes fondrières qu’il faut traverser ; d’abord on se trouve alors en vue d’une superbe avenue depuis si longtemps venue que plus d’un arbre en est mort ; tout au bout, un conifère un peu chauve et solitaire mort à ce château de Fay, plus beau loin que de près.
Or, inconséquence extrême, si ce châtelain que j’aime m’offrait le château lui-même que je vous peins au pastel, sans doute banale et sotte, je prendrais la Sologne avec le pin qui sanglote et les trous et le castel, dussé-je, pour le prix de vente, lui chanter sans variante merci au château de Fay plus beau de loin que de près. »
Cette farce a reçu une réponse de la part de la châtelaine, qui n’est autre que la mère de Maurice Mac Nab, Béatrix :
« Je ne fus jamais bien austère, vous le savez mon jeune ami, votre muse parfois légère ne me cause donc seul souci et sans rancune je veux rire de la très plaisante satire où vous chapez mon pauvre Fay, plus beau de loin que de près.
Quoique votre verve critique ait un peu chargé le tableau, je reconnais pour véridique certains traits de votre pinceau. Pourtant, admirez ma faiblesse, naïvement je me confesse d’aimer ce vieux château de Fay qui n’est beau ni de loin ni de près. »
Images : Archives municipales Vierzon
À circonstances exceptionnelles, destin exceptionnel. Destin tragique que celui de Raymond Toupet. La seconde guerre mondiale l'a conduit au sacrifice, fusillé dans sa barque le 6 février 1942, à l'âge de 40 ans, il y a tout juste 80 ans.
C'est l'histoire d'un passeur, comme Vierzon et sa région en ont connu beaucoup, à partir de juillet 1940. Certains sont restés anonymes. Certains ont été interpellés, condamnés, incarcérées et libérés. Les récidivistes auront été sévèrement châtiés, envoyés en déportation. Beaucoup y sont morts. D'autres seront fusillés sur place, comme Raymond Toupet.
Il est né en 1902 et exerçait la profession d'ouvrier ajusteur lorsque la guerre a été déclarée. La convention d'armistice instaurait une Ligne de Démarcation sur le Cher, qui fut mise en place dans les premiers jours de juillet 1940.
Habitant Thénioux, il voit se monter la guérite de la « Zoll » non loin de chez lui. Grâce à une bonne connaissance des lieux et de la rivière du Cher, c'est tout naturellement, avec son frère Marcellin qu'il organise les passages des premiers clandestins vers la zone libre. Au début ce sont essentiellement des éfugiés ou des soldats prisonniers évadés que les frères prennent en charge dans la barque de Raymond.
Les Allemands l'arrêtent une première fois en 1941, condamné à 8 jours de prison au Bordiot. Une fois libéré, il reprend de plus belle son activité, faisant passer de nombreux clandestins, aviateurs, condamnés recherchés par les autorités allemandes ou françaises...
La filière des frères Toupet est connue jusque dans les stalags allemands. Les candidats au passage en Angleterre via l'Espagne avaient également ce même renseignement.
Parallèlement, les candidats au passage renseignaient Raymond des nombreuses activités des troupes d'occupation en zone nord, renseignements que Raymond collectait et transmettait au deuxième bureau de l'armée d'armistice, à Châteauroux, dont beaucoup d'officiers travaillaient en fait pour Londres.
Repéré au bord du Cher à Thénioux, Raymond est pris pur cible par les Allemands le 6 juin 1941. Les deux frères s'enfuient en zone libre. Recherchés par les autorités, ils sont convoqués au tribunal de la Feldgendamerie le 1er juillet 1941 (voir image jointe). Le 3 ils sont condamnés à mort par contumace.
Raymond poursuit tout de même son activité de passeur. Il s'installe en zone libre, à Vierzon Bourgneuf. Des rabatteurs des environs lui envoient des candidats au passage. Il les passe la nuit, dans sa barque, entre Abricot et Genette. Et le 27 novembre 1941 il essuie un nouveau tir de douanier. Il est blessé à la jambe et sera soigné à Châteauroux.
Alors que Marcellin est mis en résidence surveillée à Lignières par la police de Vichy, Raymond Toupet poursuit seul son activité de passeur. Son dernier passage a lieu le 6 février 1942.
À cette époque de l'année où le Cher est en crue, cinq clandestins ont pris pied à bord de la barque lorsqu'elle est prise pour cible. Raymond s'écroule pendant que les clandestins se mettent à plat ventre. Un d'eux se sauvera en passant par dessus bord. Il sera récupéré par les Allemands le lendemain ; il s'était accroché aux branches d'un arbre au milieu du Cher.
Le lendemain également, on retrouve la barque où gît le corps de Raymond à la Loeuf sur la rive sud ; les clandestins ont disparu.
Ses obsèques seront célébrées à Bourgneuf le 10 février en présence des officiers de l'armée d'armistice de Châteauroux.
En 1945, un procès va avoir lieu au tribunal de Bourges, dans le cadre des procès de l'épuration. En effet, les langues se sont déliées et on accuse A..., un des rabatteurs de la filière Toupet de l'avoir dénoncé. Ces archives judiciaires ont été récemment déclassifiées et sont donc consultables par tous.
À la lecture des différents actes, on en apprend également beaucoup sur l'organisation des passages. En février 1942, Raymond Toupet travaillait avec deux personnes : A... et B... . A... est le rabatteur de Raymond, celui qui prend les contacts avec les clandestins et qui les dirige vers la barque de Raymond. B... quant à lui est le financier. Les passages n'étaient pas toujours gratuits. Les sommes demandées aux clandestins pouvaient aller de 100 francs à 1000 francs (salaire moyen d'un petit employé de mairie en 1940 = 1000F/mois).
En effet, Toupet fournissait si besoin est, des faux papiers, des vêtements, de la nourriture pour quelques jours. Et pour les plus modestes qui ne pouvaient pas payer, il lui arrivait de fournir un pécule...
Que s'est-il passé le 6 février 1942 ?
Selon le procès, les faits se sont déroulés ainsi : A... et B... avaient donné rendez-vous à la nuit tombante à un clandestin dans le café du tacot (avenue Jean Jaurès). Alors qu'ils étaient à consommer, la Gestapo a encerclé le café. Les deux portes, avant et arrière sont surveillées. Alors que la Gestapo, envahit le café par la porte principale, A... s'enfuit par la porte arrière et n'est pas inquiété par les Allemands. B... et le clandestin sont arrêtés et dirigés vers le 12 boulevard de la Liberté... Au même moment, les douaniers étaient au moulin de l'Abricot et tiraient sur Toupet. Tous les témoins qui étaient présents dans le café, déclarent que A... a sans douté dénoncé la filière. Que pas un Allemand n'a essayé de l'intercepter à la sortie du café et qu'ils n'ont pas sorti leur arme de leur étui. D'autres sont plus affirmatifs : entre rabatteurs on savait que A... n'était pas fiable.
Le procès a duré peu de temps. A... n'était pas que rabatteur, il était également passeur. Il a fourni des témoignages de personnes qui ont confirmé que leur passage s'était très bien passé et qui le remerciaient.
Au vu de ces témoignages, au vu du manque de preuve, A... a été acquitté des faits reprochés.
Il ne restait plus alors que l'intime conviction des protagonistes...
Images :Archives municipales Vierzon Archives départementales du Cher
Dans une chronique précédente (voir l'archive du vendredi 6 novembre 2020 sur Facebook), nous avons déjà évoqué la personnalité du premier maire de Vierzon, François Rouseau de Belle Île, et sa confrontation avec le lieutenant général du bailliage de l'époque.
Cet épisode-ci participe à la querelle que les deux hommes se sont livré durant des années...
Nous sommes le 20 avril 1695. François Rousseau, maire perpétuel omnipotent en place depuis deux ans, procède à l’arrestation d’un quidam qui lui semble louche. La description de ce cas nous est parvenue, une fois encore, grâce aux registres du tribunal de bailliage de Vierzon conservés aux archives départementales du Cher.
François Rousseau explique les circonstances de cette arrestation : « Nous promenant près le puy Saint Jean de Vierzon, avons rencontré un homme vêtu d’un habit d’ermite auquel avons demandé qui il était, où il allait, d’où il venait. Il nous a répondu qu’il était de Tulle et frère chapeau des Récollets. A quoi nous lui avons demandé s’il avait obédience ou passeport. Lequel nous a répondu n’avoir ni l’un ni l’autre, ce qui nous a donné lieu de lui dire qu’il y avait quelque mystère caché sous son habit et qu’apparemment n’était point frère chapeau des récollets mais quelque travesti ou espion. Aussi avant que de le laisser aller plus avant, nous étions obligés pour l’intérêt du roi et le devoir de notre charge de nous instruire du motif de son voyage.
Vêtu de séculier
Le sommant de nous le dire, il nous a dit que les pères du couvent où il demeurait près de Tulle ayant été chassés de leur couvent, l’aurait chargé, ayant des connaissances à Paris, d’aller solliciter leur rétablissement. Partis à deux, son compagnon l’aurait quitté à Aubusson.
Comme cette réponse n’était pas sincère par les différents interrogatoires que nous lui avons faits et au contraire il s’était coupé en plusieurs fois, tantôt nous disant qu’il avait quitté son couvent pour mécontentement, tantôt pour aller se faire frère de la charité à Paris.
Nous avons jugé nécessaire de prendre des connaissances plus particulières de sa personne et à cet effet nous l’avons fait entrer chez Huguenin, demeurant près le puy Saint Jean. Là nous lui avons ordonné de se défaire de sa robe d’ermite. Nous l’avons trouvé vêtu d’un juste au corps et vêtu de séculier portant chapeau lequel nous a davantage confirmé que cet homme était suspect.
Nous lui avons ordonné d’exhiber tout ce qu’il avait dans les poches : quelques livres de dévotion, un chapelet et une bourse contenant deux louis d’or. Attendu que nous n’avons pu tirer de lui aucun éclaircissement de son pays, de sa profession et du sujet de son voyage ; ses variations et le double habit dont il est vêtu donne sujet de questionnement. Nous l’avons, pour l’intérêt de l’Etat, fait conduire dans une tour de cette ville servant de prison pour demain le faire conduire sous bonne garde à Monsieur l’Intendant. »
Le travesti enlevé
Oui mais voilà, c’était sans compter sur le lieutenant du bailliage, véritable concurrent aigri du maire François Rousseau.
Au courant de l’arrestation de ce personnage ambiguë, le lieutenant général du bailliage entre en scène.
Et Rousseau de poursuivre : « Et ledit jour 21 avril 1695 par devant nous juge est comparu le sieur Huguenin chargé de fournir audit travesti le pain des prisonniers lequel nous a dit que lui portant ledit pain et étant sur le dessus de la porte des ponts qui conduit à la tour, seraient montés noble Adrian de Lanjon, lieutenant général, Gabriel Thomas, procureur du roi et Martin Richer greffier, et Mathurin Guérinet huissier lesquels lui auraient dit de lui présenter ledit travesti. A quoi il leur aurait dit que le maire l’avait fait prisonnier comme suspecté d’être quelque espion. Il ne pouvait donc pas le leur présenter sans auparavant nous demander avis. Sur quoi le sieur Lanjon se serait jeté sur lui et lui aurait tiré des mains la clé de la porte de la tour et ensuite aurait été à ladite tour, l’aurait ouverte et enlevé le travesti. Huguenin nous requérant pour sa décharge lui donner acte dudit enlèvement pour servir à valoir ce que doit. »
Qu’a donc fait le lieutenant général du travesti ? Voulait-il l’interroger lui-même ? Ou l’emmener lui-même à Bourges auprès de l’Intendant pour se faire bien voir dans ce conflit qui oppose les deux hommes de pouvoir à Vierzon ? Toutes les hypothèses sont plausibles. Cela ne lui a pourtant pas coûté sa place. Adrian de Lanjon, lieutenant général à Vierzon depuis 1650, a conservé sa place jusqu’en 1702, remplacé par René Rossignol.
On comprend mieux qu’il ait été blessé qu’un freluquet en culottes courtes piétine ses plates-bandes en 1693. Cela faisait quarante-trois ans qu’il régnait en maître à Vierzon...
Et pourtant, avec le changement de personnel judiciaire, les querelles se poursuivront entre bailli et maire. Bientôt ce sera au tour de François Rousseau d'être accusé d'avoir chanté trop fort... Affaire à suivre, donc...
1961 : Un flot de petits vierzonnais, filles et garçons, découvrent pour la première fois les joies des sports d'hiver. La joyeuse ribambelle débaroule en désordre sur les pentes de Saint Léger les Mélèzes. Les combis ont aujourd'hui remplacé les bons vieux anoraks-cagoules mais les cris résonnent de même au pied des tire-fesses.
Programme électoral 1959
Lors de la campagne électorale pour les municipales de 1959, la liste du Parti Communiste menée par Léo Mérigot présentait son programme en trois points, trois points qui seront l'épine dorsale des mandats qui suivront.
Le premier axe était le logement social. En 1959, Vierzon comporte encore beaucoup de mal logés dont certains le sont depuis 1944 et le bombardement du 1er juillet.
Le deuxième axe est celui des personnes âgées, les « Anciens », comme aimait à les appeler le 1er adjoint Fernand Micouraud. Le « colis des vieux » date de cette époque ; la construction de la maison de retraite Ambroise Croizat également...
Quant au troisième axe, ce sera celui des jeunes. Créations de nouveaux groupes scolaires, de nouveaux terrains de sport, sans oublier la crèche, sortie de terre en 1973 sur le jeune quartier du Clos du Roy.
Sports d'hiver
La jeunesse de Vierzon pourra également profiter des joies de la poudreuse lors de classes de neige organisées pour les écoliers. Chaque année en janvier les élèves de CM1 pourront apprendre le chasse neige sur les pentes des Alpes.
1961, Une... Première : quelques dizaines d'écoliers découvrent le ski à Sappey en Chartreuse, près de Grenoble. Les enfants en reviennent enchantés ; la municipalité également. Elle a gagné son pari de devenir la première commune du département à organiser ces classes de neige.
Vierzon connaissait les colonies de vacances aux Trois Brioux depuis les années 1930, dorénavant l'hiver n'est plus un obstacle « au grand air ».
La politique tarifaire permet à de nombreux jeunes de tous milieux de partir. Dès 1961 l'hôtel de Sappey se révèle trop petit. Il faut penser plus grand. C'est la commune de Pont du Fossé qui est choisie, proche de Gap. Elle a l'avantage de posséder deux vastes hôtels dont les seuls noms vont évoquer bien des souvenirs aux quadras et quinquas vierzonnais, voire aux jeunes retraités : l'hôtel « DRAC ET MONTAGNE » et le chalet « LES DIAMANTS ».
Le Brudou
Vierzon recherche dès 1964 son propre terrain où installer cette colonie d'hiver. Le terrain acheté les travaux peuvent commencer et « LE BRUDOU » peut sortir de terre et devenir opérationnel en 1969. Là encore ce nom de BRUDOU résonne à nos oreilles comme notre madeleine de Proust. Certes il y avait classe en demi-journée. Mais y aller en pantoufles, c'est quand-même quelque chose !
Aujourd'hui le brudou est toujours debout, même s'il n'appartient plus à la ville de Vierzon. Un temps propriété des PEP, il est devenu centre de colonie de vacances, été-hiver, géré par un privé.
Qu'à cela ne tienne, les nouvelles générations de vierzonnais qui ont eu ou qui auront la chance de partir à Pont du Fossé reviendront bourrés des mêmes souvenirs que leurs aînés des décennies passées.
Pont-du-fossé, février 1979
Classe de CM1, école du Bourgneuf.
Quelques jours avant « le grand départ », réunion des parents à l'école. Vérification du trousseau type ; rappel de la nécessité de coudre nos noms sur nos vêtements ; dernières consignes données aux parents. Et enfin c'est le grand jour, le grand soir plutôt.
Ramassage des élèves partant de l'école par car scolaire et faisant le tour des différents quartiers.
Arrivée à la gare. Montée dans le train affrété tout spécialement.
Voyage de nuit. Vous êtes sensé dormir pour arriver frais et dispos (dormir???)...
Descente du train, arrivée au Brudou et prise de contact avec les locaux dont l'immense cheminée centrale). Choix de la chambre. Essayage des chaussures et des skis.
Classe le matin, ski l'après-midi. Et entre les deux, la cantine et ses tables de 6 en formica.
Séance d'écriture aux parents et familles (ici tout va bien). Et le passage obligé au magasin de souvenirs (potier) pour dépenser l'argent de poche et offrir un beau souvenir aux parents (moi ce sera un pot à crayons).
Hop, en piste. Apprentissage du tire-fesses, du chasse-neige et du virage, à gauche ou à droite. Et la photo officielle qui rendra fier les parents.
Une journée spéciale en petit groupe pour le ski de fond. Et une autre à la patinoire de Gap. Sans oublier les séances de luge sur sur des sacs plastique.
La cabane dans le parc du Brudou, avec les copains. Et le dimanche soir, séance de cinéma pour toutes les classes rassemblées dans le hall. De même que la chasse au trésor.
Et puis, au bout de 21 jours qui peuvent paraître trois semaines, le passage devant un jury. Un par un pour la première étoile.
Enfin le retour à Vierzon. Retrouvailles sur le quai de la gare, récupération de la valise et retour à la maison.
Et c'est là seulement que les choses sérieuses commencent : « Alors, raconte !... »
Février 1979, hier…
Images : Archives municipales Vierzon
Au sortir de la seconde guerre mondiale, une dizaine de navires cargots et paquebots vont être construits par la compagnie des Chargeurs réunis afin de combler les pertes dues aux U-boats allemands. Un d'entre eux prendra le nom de « VIERZON », et ce n'est pas sans rapport avec notre ville.
Ce navire est intimement lié aux hauts fourneaux de Vierzon et à leur dernier maître de forge : Louis Armand Béhic.
Les forges de Vierzon, créées en 1779, ne sont pas restées longtemps entre les mains du Comte d’Artois. La « qualité exceptionnelle des fers de Vierzon » fait de l’usine une des dix plus importantes de France sous la Révolution et l’Empire. On a souvent écrit qu’elle fabriquait des fusils pour les révolutionnaires. C’est inexact. Elle se contentait de fabriquer les lingots de fer ou autre acier pour que d’autres établissements comme Bourges puissent fabriquer les fusils.
Lorsque Armand Béhic arrive sur la scène locale, Vierzon a 70 ans d’histoire métallurgique derrière elle.
Comme son nom le laisse supposer, Béhic est un vrai breton, parisien d’adoption, né en 1809 dans une famille de la haute bourgeoisie. Il poursuit des études de droit avant d’entamer des études financières. À tout juste vingt ans il entre au ministère des finances et s’engage dans l’aventure saharienne de la colonisation algérienne. Il est adjoint au Trésorier payeur général. Rentré en France il grimpe rapidement les échelons pour devenir inspecteur général des finances à 33 ans. La même année il devient Directeur du contrôle de la comptabilité du Ministère de la Marine et des Colonies avant de devenir le secrétaire général de ce même ministère. Sa vocation maritime est alors amorcée ; on suivra son importance au fil des ans.
Parallèlement, il tente une carrière politique aux législatives de 1846, se présentant dans le Nord, candidat de l’ordre moral orléaniste. Mais cette carrière est bouleversée par 1848. Et on assiste à un chassé-croisé : Pyat monte à Paris pendant que Béhic arrive à Vierzon, maître des forges. Comment a-t-il connu l’établissement vierzonnais ? C’est une question toujours actuellement sans réponse.
L’entreprise appartenait alors à un conglomérat hétéroclite avec Grenouillet à sa tête. En 1848, il sortait plus de 6 millions de kilos de fer et fonte pour un prix estimé de plus de 2,5 millions de francs par an. Lors de l’exposition universelle de 1854, on apprend que la forge vierzonnaise « sans cesse modernisée », exporte ses fers vers deux types d’industries : le rail et la mer. Vierzon fabrique « des rails mais aussi des fontes, câbles et aciers de premier choix pour la marine ». Le catalogue ne dit pas si l’impulsion maritime a été donnée par Béhic, mais, en tant que maître de forge, il se devait de trouver de nouveaux débouchés pour son usine.
Pourtant, Béhic, dont on ne sait s’il est directeur ou co-propriétaire, n'est resté que trois ans à Vierzon, de 1848 à 1850.
Une fois Béhic parti, il n'y aura plus de maître de forge à Vierzon. Des décisions prises de loin seront appliquées sur place par de simples administrateurs...
Il co-fonde alors avec Besson la Compagnie Maritime des Messageries Impériales, véritable pendant maritime aux Messageries terrestres de Casimir Lecomte, et dont le siège est à Marseille. La démission de Besson sept ans plus tard (1859), le fait seul maître à bord. Pour transporter les marchandises, il faut des bateaux. Il fait construire à La Seyne des immenses chantiers navals. Les navires sortis des chantiers seront les fleurons de la marine française. Les dragueuses du canal de Suez seront issues de ces mêmes chantiers...
Parallèlement, Napoléon III, impressionné par cette réussite le nomme ministre de l’agriculture, du commerce et des travaux publics, poste qu’il occupera à plein temps jusqu’en 1867.
De retour à Marseille, il reprend alors la tête des messageries maritimes qu’il ne devra plus quitter jusqu’à son décès en 1891. À la tête de la compagnie – sa compagnie – il en organise le règlement interne, codifiant le moindre geste des équipages. Chacun se voit remettre un manuel à respecter à la lettre. Ce souci du détail va jusqu’à réglementer la circonférence des boutons d’uniformes. Aujourd’hui encore, un uniforme béhic est la veste courte des officiers de marine.
Il fondera plusieurs lignes : l’Atlantique du Sud depuis Bordeaux en 1860, l’Indochine en 1862, la Réunion en 1864, l’Australie en 1880.
Patron social, il organise dans les chantiers navals les magasins subventionnés, les écoles et les cours du soir, les caisses de secours mutuels et les pécules en cas d’accidents du travail.
Le Armand Béhic, transpacifique des French Lines, fut construit en hommage dès 1892, mis en service en 1894. Affecté à l’Australie puis à l’Extrême Orient, il sera désarmé puis vendu en 1924. Il possédait le même blindage des paquebots de la classe du Titanic…
Quant au « VIERZON » il est conçu en 1946. Depuis la mort de Béhic, des actionnaires nouveaux sont arrivés, des lignes ont été vendues, la compagnie a plusieurs fois changé de patron.
Pour rendre hommage aux patrons qui se sont succédés, les dix navires ont tous reçu comme nom celui d'une ville qui avait de l'importance à leurs yeux.
Et pour rendre hommage à Béhic, c'est VIERZON qui fut choisi...
On peut lire : Jean MARIE, Le souvenir d’Armand Béhic, Paris, 1942
Images : BNF Gallica
Ici commence l'enquête. Qu'est ce donc que cet éguilan que l'on donne aux enfants ? Dans les musées des arts populaires et folkloriques ? Rien. Aux archives du Cher ? Rien non plus... Il faut faire appel aux plus fins limiers, passionnés d'histoire du Berry, voire de berrychonneries, voire de vieils parlures d'autrefois, voire de tout cela à la fois.
En attendant, c'est un poète et académicien... breton, (eh oui) qui va nous en apprendre un peu plus sur notre tradition. Découvrons un extrait de « Fêtes et coutumes populaires » de Charles Le Goffic en 1911 :
La spécialité culinaire est donc bien spécifique pour Vierzon. Reste à en connaître les détails.
Enfin, quelques jours plus tard, la Dépêche se fait à nouveau l'écho de la tradition. L'article du 31 décembre a fait réagir un vieux boulanger retraité qui a pris la plume pour expliquer ce qui se faisait « de son temps », c'est-à-dire au siècle précédent. Il explique qu'il s'en vendait « plus de 2000 douzaines » rien que le jour de l'an. Quant à sa forme, notre anonyme vieux boulanger a une explication bien à lui, explication que l'on se transmettait de bouche à oreille de pâtissier depuis des générations.
Aujourd'hui la tradition est morte. Quand était-elle apparu ? Notre vieil historien Béchereau, en 1750 n'en a pas parlé. Peut-être que l'aiguilan n'existait pas encore. Ou plutôt qu'il n'a pas estimé nécessaire d'en parler. Aujourd'hui cela fait une centaine d'années que la tradition est morte. Peut-être une boulanger s'en emparera pour faire revivre notre « lichounerie » purement vierzonnaise...